Quelques réflexions sur deux points qui ont attiré mon attention.
- Le premier point concerne ce qui se passe chez Corneille.
Tout d’abord, le texte lu n’est que quelques lignes tirées du texte complet, mais je suppose que vous avez la mémoire du texte entier.
Corneille est un centurion romain, mais qui est croyant et même pieux et très apprécié du peuple.
Il a une vision dans laquelle un envoyé lui dit de faire venir Pierre.
Pierre de son côté a aussi une vision qui l’invite à passer du particulier à l’universel, c.-à-d. de ses catégories juives aux catégories de la création tout entière.
C’est ce qu’il commence à faire, car il entre chez le centurion, ce qui n’était pas permis.
Que fait Pierre chez Corneille ? Il parcourt les Écritures à la manière de Jésus aux disciples d’Emmaüs et explique que les Écritures se sont accomplies alors que les notables pensaient avoir gagné la partie en éliminant le fauteur de troubles.
La brûlure dans le cœur du chemin d’Emmaüs est remplacée par le don de l’Esprit, lui-même.
Nous avons donc une Pentecôte particulière chez Corneille. Voyez la révolution et la révélation faite aux croyants juifs d’origine.
Le résultat est l’extension de la communauté faite de juifs d’origine et de non-juifs, tout ce monde forme maintenant une seule et même famille.
Alors, je reste toujours étonné de l’étonnement de Pierre sur le fait que l’Esprit soit également répandu sur les personnes de nations païennes.
Et Pierre s’exclame : « en vérité, je le comprends maintenant, Dieu est impartial ».
Je me dis que l’adjectif « impartial » n’est pas celui qui convient ici.
Pierre aurait pu dire également, « concernant le don de l’Esprit, Dieu ne fait pas de différence entre ceux qui sont juifs d’origine et ceux qui ont une autre origine ».
C’est la réalité que Pierre et les autres croyants juifs d’origine viennent de vivre et les faits sont têtus.
Néanmoins, cette formulation serait toujours insuffisante, car Dieu n’est pas seulement un Dieu débonnaire ou miséricordieux, en ce cas précis.
Non, le don de l’Esprit était toujours déjà destiné à toutes les nations, le don de l’Esprit était depuis toujours destiné à toutes les nations, en commençant par Israël comme point de départ, mais point de départ seulement.
Au moment précis où Pierre fait cette remarque, il progresse, il est en progrès constant. L’Esprit le fait progresser à toute vitesse dans la compréhension du plan de Dieu.
Néanmoins, il lui reste encore du chemin à faire pour comprendre et entrer totalement dans ce plan. Le temps lui sera donné pour cela.
Cela n’empêche pas Pierre d’être à la tête des apôtres. En effet, d’un côté, il doit affermir ses frères, c’est la mission que le Christ lui a confiée durant la Passion. De l’autre, il doit, comme tout le monde, et plus que tout le monde en tant qu’apôtre, progresser dans la compréhension du plan de Dieu et pour y entrer plus avant.
- Le second point concerne l’exhortation du Christ « demeurez dans mon amour ».
Je trouve qu’il y a dans les événements qui ont lieu chez Corneille une bonne illustration de cet amour qui nous fait demeurer ensemble.
La prédication de Pierre chez Corneille, confirmée par le don de l’Esprit, - don qui surprend Pierre et ses frères juifs,- est suivie de la demande de la maisonnée que Pierre reste avec elle quelques jours.
C’est le même sentiment qu’avaient éprouvé les disciples d’Emmaüs à l’égard du Christ, et l’ont exprimé en avançant des arguments objectifs, « Reste avec nous, car le soir tombe et le jour déjà touche à son terme ».
Voilà l’origine de l’amour qui nous fait demeurer ensemble.
Bien entendu, la mission et le travail nous amènent par la suite à aller là où l’Esprit nous envoie, cela peut être juste à côté.
Néanmoins, ce premier don de l’amour qui nous fait demeurer ensemble est fondateur de la communauté chrétienne. Il nous fera nous connecter à un autre groupe, car dans chaque groupe, il y a un je-ne-sais-quoi qui nous est commun, qui nous fait que nous nous reconnaissons.
La communauté ne consiste pas nécessairement en un groupe habitant le même lieu géographique. La communauté est avant tout l’Esprit qui est entre nous. Et c’est parce que l’on perçoit l’Esprit chez l’autre, que cet autre devienne un frère ou une sœur.
Cela est valable pour la communauté chrétienne en son ensemble, comme pour toute communauté locale, et toute communauté religieuse.
Roland Cazalis, compagnon jésuite
Ac 1, 15-17.20a.20c-26 ; Ps 102 (103), 1-2, 11-12, 19-20ab ; 1 Jn 4, 11-16 ; Jn 17, 11b-19