Nous sommes entrés en carême. Se cherche une vraie conversion en nos cœurs pour les rendre plus aptes à recevoir la bonne nouvelle de la Passion du Seigneur, de son Passage pour pouvoir nous aussi entrer dans la vraie vie, à tous promise. La première étape consiste certainement à prendre conscience de notre véritable situation intérieure. Le passage d’évangile d’aujourd’hui nous aide à avancer sur ce chemin.
La vraie vie est celle de la miséricorde de Dieu le Père véritablement vécue par nous en toute situation, en toute relation. Et pour cela Jésus propose quatre points de vigilance dans notre manière de faire : ne pas juger, ne pas condamner, pardonner et donner.
A quel changement cette liste nous invite-t-elle donc en notre intérieur ? Jésus ne propose pas cet ordre sans raison. Y a-t-il une manière de nous l’approprier pour prendre conscience du changement d’attitude profonde à laquelle Jésus nous appelle pour renouer avec la miséricorde paternelle…
Ne pas juger, c’est accepter de ne pas se mettre en position de surplomb par rapport à la situation… sa richesse m’échappe toujours et mon savoir est limité… vouloir tout comprendre par moi-même de l’autre est une attitude fausse, je ne puis comprendre qu’à partir de ma propre position et proposer, de là, éventuellement une perspective de vie à l’autre dans une parole prophétique de bénédiction. Tout comme condamner, c’est vouloir m’arroger un droit royal sur l’autre qui ne m’appartient pas. Après ces deux adresses négatives, deux adresses positives la première pardonner, la seconde donner…
Pardonner appelle à considérer la personne en elle-même au-delà de ses actions, de relativiser ses actes par rapport à la personne qu’elle est appelée à devenir, c’est m’ouvrir à la perspective d’un avenir pour elle et aussi pour moi… Donner c’est rejoindre en moi celui qui ne cesse de recevoir la vie de son Père, c’est me retrouver dans le flux de la vie véritable, c’est être pleinement vivant, souverain, libre, miséricordieux de la miséricorde généreuse du créateur.
A travers ces étapes tournées vers l’extérieur, vers l’autre, Jésus nous conduit ainsi à un vrai chemin intérieur en passant de l’intelligence qui risque de juger, à la volonté qui risque de condamner puis au cœur humble qui pardonne… là où demeure notre Père qui sans cesse se donne à moi et aux autres, tous les autres.
Prenons aujourd’hui le chemin du retour vers notre cœur.
Jean-Luc Fabre, compagnon jésuite