Jardinier de Dieu

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Pourquoi ce nom ? Un de nos jésuites va vous répondre


Dimanche 5 juin 2022 - Bonne fête de la Pentecôte à tous et à chacun !

Publié par Roland Cazalis, compagnon jésuite sur 4 Juin 2022, 12:20pm

Catégories : #homélie_cazalis

Pour cette fête de Pentecôte, le don de l’Esprit, nous avons trois textes d’une grande densité. Un seul aurait suffi. Je ne vais relever que l'un ou l'autre aspect.

L’événement est remarquable. L’Esprit s’annonce. Il y a, nous dit Luc, d’abord comme un violent coup de vent. Un peu comme les trois coups qui précèdent le lever des rideaux, un signal qui capte notre attention, qui nous dit que quelque chose d’inhabituel est en train de se produire.

Puis l’Esprit se fait visible : le feu ! Comme une langue de feu !

Il se fait audible : la voix !

La voix qui parle par les voix des disciples en araméens avec l’accent galiléen, une voix suffisamment forte pour attirer la foule et une voix que tout le monde entend dans sa langue maternelle.

La voix parle à tout le monde en même temps.

Dans la voix, ils entendent la parole.

La métaphore a des limites, mais elle permet parfois d’avancer dans la compréhension.

Certains artistes ont une voix qui raconte quelque chose, et c’est cela que l’on écoute. Et tout le monde entend ce que la voix raconte, quelle que soit la langue de l’artiste.

« Entende qui a des oreilles », disait le Christ, entende qui a cette sensibilité.

On ne cherche pas à comprendre, mais à entendre, car ce que raconte la voix fait du bien à l’âme, de même qu’une fleur qui attire le regard fait du bien à l’âme.

Quand nous lisons, il se peut que nous écoutions le son des mots, de manière  à transformer l’écriture en son, en voix.

Annoncer la parole passe donc par la voix. Cela peut paraître une banalité. Le texte doit se transmuter en voix.

Cet événement n’a rien de commun avec une exégèse qui soumettrait le texte à la torture pour le faire avouer la vérité.

Cette pratique a été bannie dans le monde judiciaire dans nos pays avancés, car le prévenu finit par dire ce que l’on attend de lui pour échapper à la souffrance.

De la même manière, le texte finit par se rendre et dire ce que l’on attend de lui.

Mais cette vérité-là sera fixe, morte, comme un fossile, tandis que la vie poursuit son chemin.

La parole n’est pas fixe. Elle est vivante. Elle se meut. La parole n’est pas le texte.

Alors, il apparaît qu’annoncer l’évangile, c’est devenir la voix de l’Esprit pour que la parole s’entende.

Heureusement, ce n’est pas un événement que l’on maîtrise. Personne ne peut prétendre devenir la voix de l’Esprit, si l’Esprit ne s’y invite.

Paul fait d’ailleurs la distinction entre ceux qui sont sous l’emprise de la chair et ceux qui sont guidés par l’Esprit.

Cette anthropologie n’est pas vraiment celle des Grecques, ou celle de Descartes, même si les mots sont les mêmes.

Être sous l’emprise de la chair c’est se dire qu’avec mes aptitudes, je suis capable d’être dans la vérité. Ce faisant, celui-ci fait de l’Esprit un menteur, voilà pourquoi il est dans le péché et non pas dans la vérité.

L’Esprit n’est pas contre la chair, car il n’y a pas d’opposition entre la chair et l’Esprit.

L’Esprit amène la chair à son accomplissement.

Donc, il n’y a que de l’accompli et de l’inaccompli.

L’Esprit opère l’accompli. Celui qui dit je suis accompli ou je suis dans la vérité est, non pas un menteur, mais un pécheur, à cause du jugement qu’il porte sur l’Esprit.

L’Esprit est la vérité ; il n’y en a pas d’autres. Seul l’Esprit nous fait être dans la vérité.

Paul peut parler assez librement de la différence entre être conduit par l’Esprit et être sous l’emprise de la chair, car, comme pharisien, c’était son cas, mais il ne s’en satisfaisait pas, il n’était pas dans l’autosatisfaction, il n’était pas engoncé jusqu’au cou dans l’amour propre, sinon le Christ ne l’aurait sans doute pas appelé.

Paul dit encore « C’est l’Esprit qui atteste à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu ».

Ce n’est ni la Loi, ni le dogme, ni la théologie, mais l’Esprit.

Seule l’expérience de Dieu nous enseigne ce que cela signifie.

En tant qu’enfant, nous savons ce que signifie être fils ou être fille, à cause de l’amour des parents, à cause de leur affection, à cause de leur prévenance.

Avec Dieu, il n’y a pas de différence. Il suffit d’un moment dans une vie, un seul moment, qu’on ait les larmes à l’œil à cause de la prévenance de Dieu à notre égard.  

Être sous la mouvance de l’Esprit. Notre intériorité est faite pour l’Esprit, voilà pourquoi nous aimons.

Si l’amour est la dernière nouveauté apparue sur la Terre, cela signifie que l’Esprit a eu enfin, un lieu pour habiter où il est reconnu comme tel.

Nous avons un autre signe de sa présence dans un lieu apparemment profane, à savoir, la philosophie.

La philosophie est la sagesse que donne l’amour. La sagesse devient la manifestation de l’amour.

Donc, a priori, toute personne est capable d’amour et peut devenir une demeure de l’Esprit ;

Et quand nous prenons conscience de sa présence, si nous sommes éduqués dans la foi, alors nous lui disons : reste avec nous !

Oui, nous aimerions qu’il soit notre brûlure du cœur, nous aimerions être habités par cette lumière-là.

Voilà pourquoi nous le désirons et lui disons sans cesse : viens !

Roland Cazalis, compagnon jésuite

Ac 2, 1-11 ; Ps 104(103), 1ab.24ac.29bc-30.31.34 ; Rm  8,8-17 ; Jean 14,15-16.23b-26.

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