Le billet de la paroisse est une lueur de Pâques ! Le mot du p. Chantereau m’a éveillé. Pour les Juifs croyants, il était facile d’admettre que leur Maître et Seigneur, un homme juste, ressusciterait à la fin des temps. Mais recevoir la Résurrection du Christ comme déjà là, advenue, c’était impensable. C’est ce retournement que vivent les premiers disciples ! Hou la ! Ça change rien de l’ordinaire, et ça change tout ! Il est ressuscité, là, au milieu de nos vies avec ses hauts et ses bas, ses joies et ses blessures, nos vies cabossées et parfois lourdes, infirmes et besogneuses, nos deuils. Le retournement qu’opère le Ressuscité est intérieur. Comme des yeux qui s’écarquillent, encore pleins de petits trucs qui gênent et voilent la vue. Pour les amis de Jésus, le 1er effet du Ressuscité est le doute. Un doute farouche, coriace. Car ils ont grandi, comme Pierre, en ne comprenant rien à ce « 3ème jour » où il ressusciterait. Qui a roulé la pierre ? Faut des gros moyens pour cela. La fin des temps, c’est maintenant ? Le Ressuscité fait quitter les certitudes et représentations mentales bien ancrées. Et s’ouvre un Essentiel qui ne se reçoit que dans la foi : « Il est vivant ». Au milieu de nos hauts et nos bas, le Ressuscité entraîne, patiemment, laborieusement, la foule immense des humains à sortir de leurs enfers. Aiderai-je le Seigneur à opérer en moi, en nous, ce retournement de Pâques ? La joie de Pâques est là, car comme Pierre, ou comme Marie-Madeleine au tombeau, nous comprenons que nous ne comprenions rien. Et le tombeau désespérément vide, éprouvé au début, devient un tombeau merveilleusement vide ! Un ciel s’ouvre.
Hier une note de La Croix m’a fait mal. « L’Ouest nous a toujours détestés », dit le peuple russe, boosté par les sanctions faites contre leur pays. Que se mettent-ils dans la tête ? Ça m’a découragé : ne pourra-t-on jamais se parler en vérité entre nous, Russes et Européens de l’ouest ? Ils sont chrétiens, le retournement de Pâques ne les a-t-il pas atteints ? J’ai pensé à un Dominicain qui écrit que le christianisme n’existe pas encore. Et nous ? Et moi ? Me laisserai-je retourner par le Ressuscité, pour accueillir nos réalités avec le regard de Pâques ? Toutes nos réactions mentales du type « avec lui, avec elle, c’est foutu », « avec les Occidentaux, les Russes, les Chinois, etc., c’est foutu », « et nous qui pensions que celui-ci allait libérer Israël », elles ont la peau dure. C’est celles-ci que Pâques vient retourner. Avec Pâques, je ne suis plus sûr que d’une chose : seule l’espérance ne trompe pas !
Olivier de Framond, compagnon jésuite