« Mon âme a soif de toi ; ton amour vaut mieux que la vie ». On le chante souvent, ce psaume. Il semble qu’il a habité le prophète Jérémie, mis à l’épreuve d’un monde qui n’a rien à faire de ses jérémiades. Entendre « violence et dévastation », faut avouer qu’il y a plus agréable. Mais il ne fait que donner écho de la douleur de Dieu, mis au rancart, raillé, moqué, comme le sera le Fils de l’Homme plus tard. Jérémie aurait souhaité se passer d’annoncer le malheur. Se ranger et laisser faire aurait été tellement plus simple. Sa parole n’était pas de lui, elle l’avait saisi, comme une soif, un amour de Dieu plus fort que les railleries reçues en réponse. Zut alors, il ne pourrait pas me lâcher, ce feu !
Et non, pas plus qu’il ne lâchera le Fils de l’Homme avec Pierre. Il y a un instant, Jésus avait dit à Pierre : « heureux es-tu, car tes paroles te sont inspirées du Père ». Il annonce maintenant sa passion à venir, et là Pierre réagit et entend : « passe derrière moi, Satan ». On est dans le combat spirituel. Choisir le bon ou le mauvais esprit, personne n’y échappe. Ce qui suscite le combat spirituel est l’annonce d’une réalité contrariante. Mon maître, Dieu, le Christ, le Fils de Dieu, l’Ami qui passe en faisant le bien, il va souffrir, prendre sa croix, être tué. Qui veut d’un Dieu comme celui-là ? Pierre, non. Mais moi non plus. Car il va falloir perdre Celui qui nous tire en avant et fait du bien ici et là ! Et nous alors, et moi ? La réaction de Pierre vient du Mauvais. Et il va falloir vivre le combat spirituel, nous aussi. Comme Jérémie, je préférerais vouloir la vie et laisser tomber les ennuis. Le combat spirituel du Fils de Dieu engage le nôtre. Alors suivre le Christ est un bagne, une plaie ? Non, il est un choix. Choisir la vie, la vie selon l’Esprit, ce qui est bon, ce qui plaît à Dieu, ce qui est parfait, dit Paul. Je ne peux pas vouloir la vie et le confort rêvé. Entrer dans la joie du royaume de la Vie, c’est traverser la mort, les morts, l’épreuve. C’est demeurer tourné vers Celui qui est chemin, en « perdant » donc ce qui m’attache à la mort, à moi-même. « Passe derrière moi, Satan » ! Ce n’est pas « retire-toi », c’est « ne mène pas la route ». Jésus, Christ, Fils de Dieu, apprends-nous le bon combat.
Olivier de Framond, compagnon jésuite
Jr 20, 7-9 ; Ps 62 (63), 2, 3-4, 5-6, 8-9 ; Rm 12, 1-2 ; Mt 16, 21-27