« Mes chemins ne sont pas vos chemins ». Ça, c’est Isaïe. La parabole du maître le confirme. Un maître qui donne autant à qui n’a fait qu’une heure qu’à ceux qui en ont fait 12, il n’a pas droit au chapitre chez nous ! Notre monde ne marche pas comme le royaume des cieux. Au royaume des cieux, une chose radicalement différente est que tout est don et grâce. Être mis en route, c’est un don. Travailler à une vigne, c’est un don. Et même recevoir une rétribution qui fait entrer dans la vie, c’est un don. « Je suis la vigne », dira Jésus. Le maître embauche à devenir le Corps du Christ, avec les sarments que sont les disciples bien-aimés. Ce pour quoi nous sommes créés, c’est de faire produire la vigne du Christ, d’entrer dans sa manière de regarder le monde. Il le regarde comme un envoyé, pour une bonne nouvelle. La bonne nouvelle ? Chacun(e) est disciple fils, fille bien-aimée de notre Vigneron. En Christ, le royaume des cieux vient s’inviter chez nous, frapper à notre porte, nous appeler à connaître l’œuvre du Père en sa Création.
Paul le vit à sa manière. Il s’est laissé saisir par le Christ qui le familiarise à l’esprit du royaume des cieux où tout est grâce, au point qu’il a presque envie de partir de sa terre pour ne connaître que le Christ. Mais non, « à cause de vous, je demeure en ce monde ». Car c’est ensemble que le Seigneur nous appelle à partir le rejoindre. Ensemble, c’est là notre mission à la vigne, sinon la bonne nouvelle reste inachevée. L’embaucheur semble ne pas faire grand-chose, il fait faire. Je pourrais récriminer : c’est quoi, ce maître qui ne fout rien ? Mais il sort, il appelle, il rétribue. Il sort à toute heure, et vers toute bonne volonté. Même vers les pécheurs et les publicains, comme on l’a célébré avec la St Matthieu ! Même vers nous, vers moi ! Seigneur, enseigne-moi tes chemins, fais-moi connaître ta vigne, donne-moi d’y bosser avec goût, tous ensemble. Tu l’as confiée à ton peuple élu et tu y as appelé d’autres peuples. Vais-je m’offusquer que tu en traites d’autres que nous aussi bien ? Le cœur d’un disciple se laisse surprendre et embaucher à toute heure par la manière d’agir du Christ.
Olivier de Framond, compagnon jésuite
Is 55, 6-9 ; Ps 144 (145), 2-3, 8-9, 17-18 ; Ph 1, 20c-24.27a ; Mt 20, 1-16