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Appeler à la vie, à l’existence dans l’amour en animant les créatures de son souffle
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Soutenir ce qui existe, sinon ce dernier s’écroulerait
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Même quand la créature met des grains de sable dans les rouages de la création, le Seigneur ne la condamne pas, mais intervient pour qu’elle se détourne du mal et retrouve la vie ou croit en lui.
30 octobre 2022 : 31e dimanche ordinaire, année C
Si l’on voulait lier le texte du livre de la sagesse à celui de l’Évangile, alors on dirait que la prière qu’est la première lecture révèle la manière dont le Seigneur agit pour permettre au peuple de se convertir et parvient à la vie bonne. L’évangile relate un exemple de l’avènement du salut chez un membre du peuple en la personne de Zachée.
Voyons cette prière.
L’auteur ne parle pas de Dieu, mais à Dieu.
Voilà pourquoi il s’adresse à lui en employant « tu » et « toi ».
Il emploie le vocatif « Seigneur ».
L’orant l’appelle aussi « Maître », non pas l’enseignant, mais « le maître de la maison », le despotès grec. Ce terme a pris une connotation négative par la suite.
Il s’adresse à Dieu comme « celui qui aime les vivants (philosuchè).
Il utilise également des termes qui font appel à philia et agapè.
L’orant s’adresse à Dieu au sujet de ses oeuvres :
Voilà les mots-clés de cette prière.
Dire une prière revient à dire des paroles avec son cœur.
Cette activité nous est naturelle, car l’espèce humaine est une espèce orante.
Prier, c’est dire bonjour à quelqu’un parce que c’est un être humain. Cette salutation signifie alors « bien à toi », même si l’on ne connaît pas la personne.
Prier, c’est dire à quelqu’un « bonne journée », « bonne soirée » quand c’est dit avec son cœur.
Prier, c’est le diminutif ou le petit mot qu’on utilise pour s’adresser au conjoint, à l’être aimé, au fils, à la fille, à une connaissance et qui a trait à sa personnalité ou à une particularité qu’on aime chez lui.
L’idéal serait de parvenir à cette spontanéité et ce naturel avec Dieu en s’adressant à lui par des paroles dites avec son cœur.
Voyons maintenant comment la prière de l’orant est mise en pratique dans l’évangile.
Nous avons, en la personne de Zachée, non seulement un abuseur officiel, mais un chef des abuseurs officiels ou collecteurs d’impôts pour l’administration romaine.
Le désir de voir « qui était Jésus » dont la réputation l’avait précédée ne vient pas d’une simple curiosité.
Les puissants ont des curiosités bien à eux et prennent le soin de mettre de la distance entre les curiosités du peuple et les leurs.
La démarche de Zachée vient du fait que nous sommes de Dieu, et tant que nous restons éloignés de lui, notre cœur reste inquiet.
Saint-Augustin a formalisé cette réalité.
Zachée voulait voir, mais c’est lui qui est vu.
Le tournant dans la vie de Zachée est induit par le regard de Jésus.
Il n’y a nulle réprimande dans ce regard, mais seulement de la bienveillance.
Ce regard porté sur Zachée est accompagné de la parole, et la parole est à l’image du regard.
Alors, la vie qui était captive chez Zachée se libère, c’est Zachée en personne qui l’annonce.
La vie va désormais circuler ; le symbole de la libération de l’amour chez Zachée est le partage et la réparation des torts faits à autrui.
L’argent compte bien sûr. Néanmoins, la réparation n’est pas tant l’argent, sinon la considération de la personne qui a été spoliée.
Il s’agit de reconnaître que leur humanité avait été bafouée.
Zachée lui-même est passé de chef des collecteurs des impôts à celui de « fils d’Abraham ».
Il est réintégré au sein de la communauté des enfants d’Abraham d’où il s’était auto-exclu.
Le salut est arrivé chez lui, dans sa maison, dans sa chair.
Roland Cazalis, compagnon jésuite
Sg 11, 22 – 12, 2 ; Ps 144 (145), 1-2, 8-9, 10-11, 13cd-14 ; 2 Th 1, 11 – 2, 2 ; Lc 19, 1-10
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