Sachons découvrir Celui qui nous parle aussi bien dans l’instant que dans la
durée…
En Jésus, le Dieu trinitaire se donne au monde d'une manière insurpassable... Tout
ce qui suivra dans la durée n'est plus que le déploiement prodigieux de cet événement final. Hans-Urs von
Balthasar Dramatique, IV, p. 27-28).
Nous allons vers la fête de Noël, dans ce temps de préparation nous pouvons essayer de
rafraîchir le sens de certains mots, pour se disposer à recevoir, à rencontrer… Aujourd’hui, le mot « durée».
Disons le tout net, la durée ne semble pas avoir beaucoup de valeur dans les
citations d’Evène. L’enjeu apparaissant à beaucoup de vivre intensément une situation, ainsi pour Sénèque. « L'essentiel est l'emploi de la vie, non sa durée. »
De la même manière, pour Thomas Hardy« L'expérience consiste en intensité, non en durée. »
[Tess d'Uberville]
Et Aristote, d’une manière pratique, en
tire la conséquence « La tragédie doit renfermer la durée de son action dans un
tour de soleil. »
Emmanuelle Arsan situe instant, durée
et éternité, l’éternité se vivant plus dans l’instant que dans la durée, ce qui consonne bien avec une approche érotique de l’existence « L’éternel amour peut durer une seule nuit, parce que l’éternité n’est pas ce qui fait durer, mais ce
qui abolit la durée. » [Emmanuelle
IV]
Alors que penser de tout cela ?
Milan Kundera ouvre un nouveau champ. Il ouvre celui du travail, du travail de la forme et cela ouvre le champ de la valeur à la durée, nécessaire aussi pour se communiquer à d’autres
« Imprimer la forme à une durée, c'est l'exigence de la beauté mais aussi celle
de la mémoire. » [La Lenteur]
Jean Claude Bourles valorise encore
plus la durée, par elle et en elle, une dynamique prend corps « Dès l’instant
où elle s’inscrit dans la durée, la marche secrète une sorte d’euphorie. » [Le Grand Chemin de Compostelle] : il concilie
instant et durée, l’instant ouvre à un nouveau dans la durée…
Glenn Gould ce grand interprète de Bach
dit l’enjeu de l’art qui concilie « L'objectif de l'art n'est pas le
déclenchement d'une sécrétion momentanée d'adrénaline, mais la construction, sur la durée d'une vie, d'un état d'émerveillement et de sérénité. » [A bas les applaudissements]
La vie doit être vive, et pour cela être marquée par
de grands événements, mais elle doit ensuite laisser diffuser ce dont était porteur le grand événement dans son épaisseur dans sa durée, révéler la présence au cœur même de notre
quotidien.
Un verset que j’aime beaucoup dans
l’Annonciation « Et l’ange la quitta ». Marie vient de vivre l’événement le plus important de l’histoire de
l’humanité, l’Incarnation du Verbe en son sein, et elle est renvoyée à son quotidien pour vivre de cet événement et le laisser se répandre dans l’humanité.
Disons « oui, amen » à tout : à l’instant comme à la durée. N’ayons de cesse d’être
disponible à ce qui vient… Prenons doucement forme et visage ! Vivons ainsi ce temps de l’Avent, pleinement en le sachant gros, dans son quotidien, d’une promesse. Travaillons à
l’accueillir, à la laisser se manifester dans le quotidien… comme un pain à façonner, à cuire, à partager et à consommer entre frères !
Père
Jean-Luc
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