Jardinier de Dieu

Jardinier de Dieu

Pourquoi ce nom ? Un de nos jésuites va vous répondre


Dimanche 24 octobre 2021

Publié par Roland Cazalis, compagnon jésuite sur 23 Octobre 2021, 12:09pm

Catégories : #homelie_cazalis

Mercredi dernier, l’université catholique de Lille a inauguré la chaire(²) « Sciences, Technosciences et Foi à l’heure de l’écologie intégrale ».
 
C’est un lieu de proposition, car nous constatons que les technosciences, avec l’intelligence artificielle (IA), sont parvenues à l’ère du faire sans comprendre. L’IA se développe, mais on ne sait pas pourquoi cela fonctionne ni comment cela fonctionne ; c’est une boîte noire comme le cerveau.
 
Face à la montée en complexité des technosciences, l’Église n’a pas à trembler, ni à crier au loup, ni à rejeter cette réalité. Elle doit plutôt prendre les devants pour faire des technosciences un outil au service du bien commun.
 
Dans sa pratique, l’Église doit ériger des contreforts éthiques et pratiques qui soient spécifiques aux technologies, sachant qu’un agir local peut transformer le global.
 
La notion de contrefort est empruntée à la construction de cathédrale. Le contrefort en architecture ne s’oppose pas à l’élévation des murs. Bien au contraire, il est là pour les soutenir et les guider dans leur progression vers le ciel, avec des arceaux pour les sécuriser.
 
L’Église ne doit pas rester là à se lamenter, assise au bord du chemin. Elle a besoin de voir autrement ; elle doit se lever d’un bon, avec enthousiasme et espérance, pour se mettre en marche avec le monde, mais non pas comme le monde.
 
Dans la mouvance du faire sans comprendre des technosciences, nous avons l’impression de marcher dans l’obscurité, et nous risquons de nous habituer à cette forme d’obscurité du comprendre et de nous contenter du faire, tant que cela fonctionne.
 
L’archevêque de Lille, Mgr Laurent Ulrich a ouvert la cérémonie d’inauguration en donnant à cette équipe de recherche cette mission.
 
Recevoir une mission, voilà comment nous fonctionnons dans l’Église, et ce faisant, nous ne faisons que suivre le modèle du Christ, un envoyé. Lui-même ne fait que suivre l’exemple du grand prêtre « qui ne s’attribue pas cet honneur à lui-même, mais est appelé par Dieu ». C’est ce que nous rappelle Paul dans la lettre aux Hébreux de la deuxième lecture.
 
Il ne suffit pas d’être intelligent, d’être génial, de dépasser tout le monde par sa science. Pour être envoyé, il faut être dans le bon esprit, ou avoir le bon esprit. Il faut être dans la lumière, sinon, on ne pourra jamais servir Dieu, car on aura toujours une meilleure idée que lui sur ce qu’il convient de faire ou de dire.
 
Paul de Tarse était, parmi les apôtres, certainement le plus intelligent, le plus lettré, le plus véloce mentalement. Néanmoins, il ne pouvait pas servir Dieu ; il n’était que le serviteur de sa science de la Loi. Son action ne conduisait qu’à l’emprise sur la vie des autres, qu’à la mort des autres.
 
C’est seulement quand il est entré dans la lumière sur le chemin de Damas qu’il a pu devenir le serviteur de Dieu que nous connaissons.
 
Bartimée a gardé le goût de la lumière, le goût de voir, de voir la vérité. Et contre la voix de ceux qui lui disaient « reste comme tu es ! », « reste dans la ténèbre », il a crié encore plus fort.
 
Bartimée désirait voir ! Il désirait retourner à la lumière, être dans la lumière !
 
Je crois qu’un tel désir doit habiter l’Église par rapport à la situation qui est la sienne actuellement, par rapport à l’avancement du monde.
 
Retourner à la lumière, non pas sous les feux des caméras et des flashes des photographes. Ce n’est pas de cette lumière-là qu’il s’agit.
 
Le groupe de Jésus et des apôtres et ceux qui les accompagnaient sont en route pour Jérusalem, un chemin qui s’achèvera avec l’entrée triomphale de Jésus dans cette ville.
 
Bartimée veut être du voyage, et il jette son manteau par-dessus bord, soit le bien le plus précieux qu’il possède en tant que mendiant et aveugle.
 
Cela nous rappelle le manteau de François d’Assise, lui qui n’était pas un indigent, ou tous ceux qui ont suivi Jésus en laissant derrière eux leur sécurité matérielle et sociale ; leur réputation.
 
« Fils de David, prends pitié de moi » !
 
« Que voulez-vous que je fasse pour vous ? »
 
Voilà une réponse que Jésus pourrait faire à l’Église locale, au cas où il y aurait un appel à l’aide de sa part.
 
Que répondrait l’Église locale ?
 
Je laisse à chacune le soin de formuler sa réponse ou sa demande.
 
Le projet de contrefort éthique dans l’accompagnement de la marche en avant des technosciences doit se faire en disciple du Christ, tel est l’objet de l’envoi en mission par l’archevêque.
 
Marc nous dresse un portrait du disciple idéal, celui qui veut voir la lumière, celui qui entre dans le bon esprit, celui qui jette son manteau pour rejoindre le Christ en route pour Jérusalem et qui par la lumière nouvelle est devenu disciple. Il suit le Christ désormais, passant par le même chemin que lui.
 
En suivant le Christ, le disciple ne peut pas faillir.
 
Roland Cazalis, compagnon jésuite 
(²) : l'auteur de ce texte est chercheur associé dans la chaire, il était à cette inauguration. 
Jr 31, 7-9 ; Ps 125 (126), 1-2ab, 2cd-3, 4-5, 6 ; He 5, 1-6 ; Mc 10, 46b-52
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