Jardinier de Dieu

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Pourquoi ce nom ? Un de nos jésuites va vous répondre


Dimanche des Rameaux et de la Passion du Seigneur, 2018

Publié par Père Roland Cazalis sur 24 Mars 2018, 10:54am

Catégories : #homelie_cazalis

Cette fête des rameaux est un paradoxe, car nous ne l’avons jamais vraiment approfondie dans l’Église, car elle a toujours été mise au second plan par la Passion.

Le peuple est versatile, néanmoins, saisissons cet instant, où les gens mettent leurs manteaux  ou des feuillages par terre comme tapis rouge pour saluer le passage du christ. Ils saluent sa grandeur, lui qui a passé son temps à leur faire du bien, à les remettre sur pied, et à les libérer de l’abus de pouvoir spirituel des scribes et des pharisiens.

La confrontation de Jésus avec ses détracteurs n’a pas qu’une portée locale. Elle symbolise et rend possible l’attitude du disciple dans le monde, celle de ne pas se faire complice du mal qui broie les petits, celle d’être un autre Christ là où le disciple se trouve.

La phrase que dit Jésus à Pilate est fondamentale ; « quiconque appartient à la vérité écoute ma voix ».
L’approche de la vérité dans la modernité a fini par provoquer une suspicion généralisée sur cette notion puisque la modernité l’a détachée de l’expérience de soi, du souci de soi, et de l’expérience du divin. La dégradation de la notion de vérité a conduit à la notion de post-vérité.
L'idée selon laquelle il est plus facile de façonner et d'infléchir l'opinion publique en jouant sur les émotions et la démagogie que de s'appuyer sur des faits avérés.
L’exemple type est la déclaration de Colin Powell (général et secrétaire d'État américain) le 5 février 2003 à l'ONU, où il apporte des "preuves" (reconnues comme fabriquées par la suite) de la production d'armes de destruction massive par l'Irak. Cela permet de justifier la déclaration de la guerre à Saddam Hussein.  Depuis, le chaos règne dans cette contrée.

La question de Pilate « qu’est-ce que la vérité ? » est bien une question de Romains (procurateur romain (26-36)). Une question de quelqu’un qui s’intéresse à l’opérativité, la fameuse opérativité romaine.
La vérité a trait davantage à l’opérativité du monde de la vie. La vérité est liée à la sainteté de Dieu, et c’est en prenant conscience de la sainteté de Dieu et étant interloqué, arrêté et séduit que l’on découvre ce qu’est la vérité.

Il s’agit d’une lumière, d’une réalité première, originelle par et pour laquelle nous sommes faits.
La sainteté de Dieu est une révélation qui nous vient du monothéisme, et c’est une lumière par rapport à l’expérience du tragique exprimée dans la tragédie grecque, véritable théologie de la religion civique  grecque aux prises avec le kakos daimon, le dieu mauvais, la laideur, l’iniquité, l’incantation vaine. Ce n’est pas sans raison que les grecs ont tourné le dos au tragique pour chercher le salut dans la raison, ou dans la philosophie comme manière de vivre.
« Qu’est-ce que la vérité ? » Voilà une question qui n’a pas lieu d’être posée, car elle n’a aucune opérativité, on comprend pourquoi la religion civique romaine est morte par inadvertance, sans crier gare, quand les Romains se sont tournés vers une autre opérativité, en commençant par le premier d’entre eux, Constantin.

Durant cette semaine sainte, nous verrons, comble d’ironie, le Christ confronté à l’iniquité, à la laideur, au mensonge.
Mais nous tâcherons de  diriger notre regard vers la sainteté de Dieu confrontée au désordre de la chair (sarx), à l’arbitraire, au désir de meurtre, au désir de verser le sang de l’autre comme l’illusion qui permet d’extirper la douleur qui vient de la jalousie ou le ressentiment accumulé.

En suivant le Christ dans son périple, il nous montera comment il dépasse ce désordre et ouvre une nouvelle époque cosmique entre Dieu et le monde.

Père Roland Cazalis

Merci à l'auteur de cette image

 

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