« Malheureux » le scribe, le pharisien parce qu’il rate sa cible, qu’il n’arrive pas à accéder à ce qu’il dit chercher, qu’il rate l’éducation de celui qu’il veut former au mieux comme s’il n’avait pas de chance mais à vrai dire il n’y a pas que cela… il y a dans les manières de faire, d’être des scribes et des pharisiens quelque chose qui conduit à la mort, parce que la respiration de la vie en eux n’est pas respectée.
Ces manières mortifères consistent à poser des conditions restrictives à partir de soi-même, de son jugement : fermer les entrées en s’arrogeant le droit des clefs, ou encore ne retenir qu’une seule personne en le sélectionnant et en lui imposant un itinéraire, comme avec le converti, ou encore décider sur des conséquences de la situation à considérer mais pas sur les bases de la situation elle-même et notamment des personnes concernées dans la situation…
Cette manière restrictive nous l’avons tous en nous, avec la tendance à retenir exclusivement une manière de faire qui marche et qui me conduit à exclure d’autres manières pour les autres ou pour moi et je tourne en rond, sans parfois m’en rendre compte, à retenir certains critères pour poser des choix sans considérer les situations concrètement à partir de leurs caractéristiques globales. Quelle est la part tapie en moi de peur, d’orgueil, d’enfermement dans mes certitudes apparentes : mystère…
Ne nous enfermons pas dans des manières de voir qui se rigidifient, qui excluent, qui veulent avoir le résultat avant d’entreprendre…
La vie, la vie selon Dieu, quant à elle, elle demande de s’ouvrir, avec une dynamique offerte à tous… elle encourage à faire un petit pas et puis de voir à partir de là… son maître mot c’est « tâtonnement ». La vie en plénitude, elle, elle reste ouverte à la part de mystère en chaque être, en chaque situation. L’élitisme n’est pas non plus la manière de faire du Christ, il appelle largement et il aide celui qui veut entrer, qui demande quel qu’il soit… il n’évite aucune rencontre, découverte, aventure…
Alors en ce jour où nous faisons mémoire de Saint Augustin pourquoi ne pas prendre appui sur sa philosophie pour conduire notre vie et pour prendre nos décisions « Aime et fais ce que tu veux », ou mieux encore en prenant appui sur une autre traduction du « dilige et quo vis fac » latin c’est-à-dire « considère et fais ce que tu veux ». Oui, prenons le temps de considérer la situation pleinement, de nous laisser travailler par elle, de nous ouvrir au Seigneur et à son projet sur l’humanité puis posons simplement la décision qui naît en notre cœur.
Jean-Luc Fabre, compagnon jésuite