« Notre combat, c’est recevoir la vie », dit un ami. Notre travail de conversion est de nous y disposer. Jusqu’au dernier souffle. On le voit avec Jérémie. A sa vocation, Dieu l’avait envoyé pour arracher et enlever, pour détruire et démolir, pour bâtir et planter. On arrive enfin ici aux « bâtir et planter ». Cette parole passe, pas celle qui arrachait et enlevait, ou qui détruisait et démolissait. Pourtant se disposer à recevoir la vie accueille la conversion qui passe aussi par un arrachage ou une perte du vieil homme.
Avec Matthieu, nous retrouvons le Fils de l’Homme et sa quête d’un lieu désert pour se reposer. Et là encore c’est raté ! Même chez les païens on n’est pas tranquille. … Dieu, en Jésus, vit l’épreuve d’un désir dont il se passerait bien. Une Cananéenne arrive. Elle crie. Je rêvais de silence. « Ma fille est tourmentée ». Je rêve de silence, alors silence radio. Elle crie, « elle nous poursuit de ses cris, renvoie-la ». Eux rêvaient de silence, alors ras-le-bol, la Cananéenne ! La voilà à se prosterner : « viens à mon secours ! ». Petit progrès : elle le dit, elle ne le crie plus. « Qu’as-tu, petit chien, à demander le pain des enfants ? » Elle est consolée de cette parole. Étonnant. Comme dans une prise de judo, elle va dans le sens du poil de l’interlocuteur : « oui, oui, c’est ça, et même que les petits chiens prennent les miettes sous la table de leur maître ». Dieu est désarçonné. Même les petits chiens ont la foi ! Peut-être finiront-ils chiens de berger des brebis perdues d’Israël. En tout cas, certains ne se convertiront pas, mais elle, elle a réussi à convertir Dieu ! « Femme, grande est ta foi ». Elle sait ce qu’elle veut. Elle a reconnu le berger de la Vie.
Olivier de Framond, compagnon jésuite