Lc 17, 7-10 :
En ce temps-là, Jésus disait : « Lequel d’entre vous, quand son serviteur aura labouré ou gardé les bêtes, lui dira à son retour des champs : “Viens vite prendre place à table” ? Ne lui dira-t-il pas plutôt : “Prépare-moi à dîner, mets-toi en tenue pour me servir, le temps que je mange et boive. Ensuite tu mangeras et boiras à ton tour” ? Va-t-il être reconnaissant envers ce serviteur d’avoir exécuté ses ordres ? De même vous aussi, quand vous aurez exécuté tout ce qui vous a été ordonné, dites : “Nous sommes de simples serviteurs : nous n’avons fait que notre devoir” »
Le Seigneur, dans sa parole, est parfois dur pour nous conduire vers l’attitude véritable de vie. Cette attitude de vie demande à chacun de ne pas vouloir se mettre au centre, de ne pas juger par rapport à lui-même. Jésus se comprend, lui-même, comme d’abord et avant tout le Fils du Père, se recevant de Lui, se donnant à Lui. Tout le reste de son être, de son action vient de là, de ce point d’existence.
Il sait qu’en cela consiste le bonheur véritable pour lui et pour chacun de nous. Aussi il nous y invite. Mais pour cela, il doit nous aider à nous sortir de nous-même, de notre être. Malheureusement, nous pensons nous connaître à partir de ce que nous faisons, entreprenons, sans réaliser que cela nous enferme dans une vision fort limitée de nous-même.
Du coup, la parabole de l’évangile d’aujourd’hui prend sens. Je ne suis pas ce que j’ai fait, mon grand labeur des travaux des champs. Non, je suis celui qui vit en relation avec le maître, je suis le serviteur, son serviteur. Mon être est d’abord relation à Lui, à mon maître… et si je commence à entrer dans cette perspective à vrai dire ma vie s’élargit. J’existe non sur moi-même, ma capacité à faire mais sur ma relation vivante à un autre. Cela m’entraine, brise toute limite, me donne d’entrer dans la vie plus grande…
Alors pour avancer vers ce saut vers la vie véritable prenons conscience du sens profond du mot « servir ». Servir ne veut pas dire faire des choses (où je me centre sur moi et m’y enferme) mais être en relation (une relation qui ouvre sans cesse de nouveaux possibles). Servir est un verbe de relation. Le serviteur ne fait pas des « prestations de service », il est avec son maître. Efforçons-nous de vivre ainsi… le bonheur véritable en sera le fruit.
Jean-Luc Fabre, compagnon jésuite