La porte étroite, elle est tellement étroite qu’elle est presque invisible ! C’est celle de l’engagement du mariage, je crois. Une nièce qui s’est mariée samedi l’a réveillé en moi. C’est la porte qui choisit le don mutuel engagé devant Dieu et devant les hommes : la porte de Dieu. Elle est étroite, presque invisible, on l’oublie très vite si on ne la pratique pas. Cette nièce et son mari, pas des foudres de « pratique », la pratiquent. En tout cas ils l’ont choisie, et tous étaient saisis.
Abram l’a choisie. Apparemment elle est plutôt du côté de la pauvreté. Dieu se donne davantage dans le manque, pas dans la suffisance comme Loth va l’éprouver. Le troupeau immense d’Abram, la descendance future immense d’Abraham, sont des fruits d’une porte étroite préférée à toutes. Il y a des portes que l’on voit mieux : le confort, la richesse, mais là ne se donne pas l’engagement réciproque d’un oui à la vie. On voit aussi aujourd’hui la porte « Wagner » et d’autres extrémismes d’un engagement fort, viril, mais il n’y a pas de place pour le don, une réciprocité, c’est un engagement qui ne se reçoit pas, il se conquiert. La porte étroite n’est pas une démission, une résignation, devant ces portes-là, non, elle fait tenir debout, pauvre, devant Dieu et devant les hommes, dans la reconnaissance que tout est don et grâce de Dieu. La seule action qui conduit ceux qui prennent ce chemin est l’action de grâce. En eux ce n’est plus eux qui vivent, c’est le Christ qui vit en eux, et nul ne sait comment.
Olivier de Framond, compagnon jésuite
Gn 13, 2.5-18 ; Ps 14 (15), 2-3a, 3bc- 4ab, 4d-5 ; Mt 7, 6.12-14