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Les lectures de la messe "Epiphanie du Seigneur" le 02 janvier 2011
Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 2,1-12.
Jésus était né à Bethléem en Judée, au temps du roi Hérode le Grand. Or, voici que des mages venus d'Orient arrivèrent à Jérusalem et demandèrent : « Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? Nous avons vu se lever son étoile et nous sommes venus nous prosterner devant lui. » En apprenant cela, le roi Hérode fut pris d'inquiétude, et tout Jérusalem avec lui. Il réunit tous les chefs des prêtres et tous les scribes d'Israël, pour leur demander en quel lieu devait naître le Messie. Ils lui répondirent : « A Bethléem en Judée, car voici ce qui est écrit par le prophète : Et toi, Bethléem en Judée, tu n'es certes pas le dernier parmi les chefs-lieux de Judée ; car de toi sortira un chef, qui sera le berger d'Israël mon peuple. » Alors Hérode convoqua les mages en secret pour leur faire préciser à quelle date l'étoile était apparue ; puis il les envoya à Bethléem, en leur disant : « Allez vous renseigner avec précision sur l'enfant. Et quand vous l'aurez trouvé, avertissez-moi pour que j'aille, moi aussi, me prosterner devant lui. » Sur ces paroles du roi, ils partirent. Et voilà que l'étoile qu'ils avaient vue se lever les précédait ; elle vint s'arrêter au-dessus du lieu où se trouvait l'enfant. Quand ils virent l'étoile, ils éprouvèrent une très grande joie. En entrant dans la maison, ils virent l'enfant avec Marie sa mère ; et, tombant à genoux, ils se prosternèrent devant lui. Ils ouvrirent leurs coffrets, et lui offrirent leurs présents : de l'or, de l'encens et de la myrrhe. Mais ensuite, avertis en songe de ne pas retourner chez Hérode, ils regagnèrent leur pays par un autre chemin.
Extrait de la Traduction Liturgique de la Bible - © AELF, Paris
« Jésus était né à Bethléem en Judée, au temps du roi Hérode le Grand ». Par sa naissance, Jésus est entré dans l’histoire des hommes. Simple enfant emmailloté, il est soumis aux influences, aux conflits de celle-ci. Il y est livré malgré lui, elle s’impose à lui. Jésus ne peut, non plus, contenir le potentiel de relations que son corps apparu représente. Cette relation lui échappe : les bergers sont venus à lui, les proches aussi et, aujourd’hui, les lointains. Cette relation qui devient « mondiale » par l’arrivée « des mages venus d’Orient » déstabilise du coup l’ordre « local » qui, de ce fait, craint pour sa survie et se retournera avec violence contre lui.
« Où est le roi des Juifs qui vient de naître ? » Comment le roi Hérode pouvait-il entendre cette demande ? « C’est lui ou moi », pas d’alternative selon son point de vue… La situation aurait-elle été différente, si les mages avaient dit : c’est d’une simple royauté spirituelle qu’il s’agit ? Que la royauté de Jésus soit dite temporelle ou spirituelle n’aurait rien changé dans la tête d’Hérode tant il était pris par le jeu du pouvoir. L’enjeu de fond est, pour chacun de nous, de redécouvrir sa juste place, comme Jésus qui accepte d’être livré à l’histoire des hommes. Jésus aime ce qui s’impose à lui, acceptant la place qui lui est donné, y percevant, en filigrane, l’amour du Père à l’œuvre. Chacun de nous est un parmi les autres. Toute distinction royale, radical appel à la proposition humble de service de l’autre.
« Ils regagnèrent leur pays par un autre chemin ». La liberté de tout homme doit être respectée d’une manière absolue pour que se façonne l’histoire du Royaume. Le pied de nez final des Mages à Hérode appelle chacun à considérer l’autre pour lui-même (le proche et le lointain). L’autre n’est pas celui que je puis utiliser dans un service comme Hérode qui « convoqua les mages en secret pour leur faire préciser à quelle date l'étoile était apparue ; puis il les envoya à Bethléem, en leur disant : ‘Allez vous renseigner avec précision sur l'enfant’ ». L’autre n’est pas non plus celui à la place de qui je puis me mettre (même si cela représente un progrès) « quand vous l'aurez trouvé, avertissez-moi pour que j'aille, moi aussi, me prosterner devant lui ». L’autre est radicalement autre que je respecte parce qu’il est autre, porteur d’une autre vision du monde, qui me sort de ma propre étroitesse, me donne ma juste place.
C’est bien dans ce même cadre relationnel, au XXIième siècle, que nous-mêmes avons à vivre en chrétien. Nous sommes porteurs d’une histoire qui nous dépasse : celle de Jésus, celle du Royaume, et nous ne cessons d’être au contact avec des libertés à respecter intégralement. Se laisser habiter pleinement par la vie du Fils de Dieu nous donnera d’habiter et d’inventer, ici et maintenant, notre juste place parmi et avec ceux qui, de fait, sont nos frères. Que 2011 nous donne de prendre chair vraiment humaine !
Jean-Luc Fabre, compagnon jésuite