Voici le deuxième texte concernant le mystère de l'Eucharistie rédigé par Maurice Zundel. Que le Ressuscité nous entraine de plus en plus en profondeur dans ce mystère !
« Le Christ une présence, toujours déjà là »
Chaque jour nous sommes confrontés à la souffrance, à la guerre, à la famine, aux tremblements de terre… La Messe est-elle un événement qui puisse retenir sur toutes ces situations ? La Messe est-elle un événement capital, un événement source, un événement qui concerne essentiellement notre vie ?
Qu’a voulu le Christ en nous donnant l’Eucharistie, sinon nous rassembler tous en l’unité d’un seul Corps tellement que, finalement,
le sens de la Messe est en effet de transformer toute l’humanité et tout l’univers dans le Corps et le Sang du Christ. Mais cela ne se sent suffisamment que si nous nous engageons à fond, si nous
nous convertissons, si la Messe retentit jusqu’aux racines de notre être, et c’est bien cela qu’elle doit réaliser pour entrer dans les intentions du Christ.
Si le Christ nous a livré l’Eucharistie, Il nous a, en partant, donné la suprême consigne de l’Amour : « Aimez-vous les uns les
autres comme je vous ai aimés. » (Jn. 13.34) Il s’est agenouillé au Lavement des pieds, pour nous apprendre que le sanctuaire de Dieu était l’homme. Il y a donc une transformation radicale qui
doit s’accomplir puisque, finalement, le culte de Dieu, -je veux dire l’union avec Dieu -ne peut pas se réaliser sans l’union avec l’homme.
Le Messe peut réaliser d’abord cette communion avec toute l’humanité, toute l’Histoire, tout l’univers, pour nous préparer à la
communion avec Dieu, car justement le Christ, qui est toujours présent, qui est toujours déjà là, qui est en chacun de nous une Présence qui ne cesse jamais de nous accompagner, le Christ ne nous
n’est pas inaccessible, et on le voit bien précisément dans l’adorable cheminement d’Emmaüs : Les disciples sont avec le Seigneur, ou plutôt Il est avec eux, mais eux ne sont pas encore avec Lui,
par ce que leur cœur n’est pas encore totalement axé sur l’Amour. Ce n’est que lorsqu’ils témoignent leur charité envers le Christ-pèlerin que, tout d’un coup, le Christ se transfigure à leurs
yeux et leur devient présent.
Nous avons à parcourir cet itinéraire. Le Christ est toujours déjà là. C’est nous qui ne sommes pas là et pour Le rencontrer, il faut
entrer dans les profondeurs de l’Amour, et cela veut dire que les paroles de consécration qui doivent retentir sur toute l’humanité et de tout l’univers, qui ont pour fin dernière précisément
cette transformation de toute l’humanité et de tout l’univers en le Corps et le Sang du Seigneur, cela veut dire que ces paroles, nous ne pouvons les dire avec sincérité qu’en les vivant jusqu’au
fond, qu’en nous effaçant dans le Moi du Christ qui les prononce à travers nous.
Maurice Zundel L’Eucharistie et la création, sermon prononcé à Genève, le dimanche 4 février 1968