Un jour, un petit garçon trouva un trèfle à quatre feuilles. Il le ramena triomphalement au village. «Le bonheur va venir, criait-il à tous les coins de rues. Regardez ce que j’ai trouvé, le signe de la chance»
Alors le sage dit aux gens du village : «rendez-vous ce soir, auprès du grand chêne, à l’heure de la brise légère. Venez tous, car un grand bonheur va nous arriver». Ils se rendirent autour de l’arbre, à l’ heure fixée.
Ils étaient là à scruter les montagnes au loin, attendant que quelque chose de sensationnel se produise. Pensez, le petit Julien a découvert un trèfle à quatre ! Mais rien ne se passait.
Alors l’ancien dit : «C’est peut-être parce qu’il nous manque quelques habitants. Sans doute que si nous parvenons à être tous présents, Dieu va nous envoyer le bonheur qu’ il nous réserve.» Sitôt dit, sitôt fait ! Les hommes les plus vigoureux se précipitèrent au village et ramenèrent en les portant dans leurs bras les vieillards et les malades, les nouveau-nés et les bambins. Et ils étaient absolument tous là, dans le souffle vespéral. Mais rien ne survenait. Pas de signe dans les nuées, pas de manifestation tonitruante.
Alors, un grand-papa prit la parole au fin fond du silence - ce sont souvent les grands-parents qui ont raison : "Et si le bonheur voulu par le Seigneur, c’était de nous retrouver tous ensemble, pour la première fois depuis cent ans, tout le village sans exception, au-delà de nos querelles de partis ou de nos bagarres de familles ; tous dans le silence du soir ?"
Et, si c’était cela aussi, le cadeau de la prière familiale ?
François-Xavier Amherdt, (préface) Jean-François Dorsaz, 2005.
Prier en famille : la part secrète des jours.
Saint-Augustin, Saint-Maurice (Suisse)
p.85