Faire équipe liturgique pour préparer la célébration, c’est toujours un labeur, un travail d’enfantement. On patauge, ça va ça vient, on piétine, ça enfonce, on repart, et nous voilà … L’œuvre a un goût heureux et un petit goût d’inachevé. L’homme cherche une aide qui lui corresponde, comme dit la Genèse. De quelle « aide » s’agit-il ? Nous sommes restés perplexes. Dieu nous laisse éprouver le manque pour que nous entrions dans son émerveillement devant ce qui s’opère devant l’inachevé. L’aide qui lui manque, il la crée avec l’être qui n’a pas fini de grandir. L’enfant apprend à nommer. Par exemple certains vont s’ingénier à trouver 10000 noms pour les fleurs des montagnes. J’en ai vu, alors que d’autres n’en ont rien à cirer mais vont mettre 1000 noms au fonctionnement d’un moteur, d’autres, à ce qui fait une qualité d’information politique, etc.
L’aide assortie à l’homme est peut-être ce qui le conduit à devenir soi-même. « Va vers toi-même », dira Dieu à Abraham. Nous n’avons pas fini de nous en approcher. L’aide, c’est ce qui fait naître à la Parole. Plus que nommer, l’être s’émerveille. « On l’appellera ischa, femme ». Elle donne de quitter son père et sa mère, comme son pays, sa maison, pour s’attacher à cette « aide ». Nous y disposer, voilà notre travail. Je ne suis unifié, un, que dans l’accueil d’un autre, dans le consentement à mon inachèvement, seul. Le manque de cette « aide », certains y consentent, d’autres l’éprouvent et ne le choisissent pas. Tous témoignent d’une œuvre qui reste à accomplir. Cela passe par une nuit à soi-même, dit la Genèse. Cette nuit, elle est peut-être celle de Jésus, à la Croix, quand au dernier souffle il s’écrie : « tout est accompli ». Il est « l’aide » offerte, qui peut faire s’exclamer : « Celui-ci est Fils de Dieu ». Un autre païen a dit un peu avant : « voici l’Homme ». A la Croix, Dieu crée pour l’homme cette « aide », pour marcher enfin vers lui-même. La gloire qu’évoque l’ardue épître aux Hébreux (on a peiné à l’entendre, en préparant) indique l’accomplissement de l’œuvre de Dieu. La ressemblance de Dieu se révèle et se donne pour relever l’humanité, la faire tenir debout, devant le Ressuscité qui fait s’émerveiller le disciple : « vraiment, Celui-ci est la vie de ma vie ». Le Christ donne d’accueillir le royaume de Dieu à la manière d’un enfant, un enfant tendu vers une quête qu’il n’arrête pas et n’enferme pas dans des lois à suivre. Vive l'inachevé !
Olivier de Framond, compagnon jésuite
Gn 2 ; Ps 127, He 2 ; Mc 10