Jardinier de Dieu

Jardinier de Dieu

Pourquoi ce nom ? Un de nos jésuites va vous répondre


Mc 3, 13-19 : Dans l’embourbée humaine, Il suscite un groupe pour maintenir l’ouverture véritable.

Publié par Jean-Luc Fabre, compagnon jésuite sur 19 Janvier 2024, 13:40pm

Catégories : #Homélies, #JLfabre, #évangile commentaire, #evangiles_piste_reflexion, #Evangile_réflexion

Mc 3, 13-19 

En ce temps-là, Jésus gravit la montagne, et il appela ceux qu’il voulait. Ils vinrent auprès de lui, et il en institua douze pour qu’ils soient avec lui et pour les envoyer proclamer la Bonne Nouvelle avec le pouvoir d’expulser les démons. Donc, il établit les Douze : Pierre – c’est le nom qu’il donna à Simon –, Jacques, fils de Zébédée, et Jean, le frère de Jacques – il leur donna le nom de « Boanerguès », c’est-à-dire : « Fils du tonnerre » –, André, Philippe, Barthélemy, Matthieu, Thomas, Jacques, fils d’Alphée, Thaddée, Simon le Zélote, et Judas Iscariote, celui-là même qui le livra.

L’un entraine l’autre dans un acte symbolique pour dire « oui » à la vie comme le fait Jésus avec ses disciples Zorba the Greek (youtube.com)
Notre situation actuelle, particulièrement en Europe, est grosse de bien des incertitudes, source d’angoisse pour beaucoup, parce que nous sentons que nous ne pourrons pas faire face dans la maitrise et que nous allons être projets dans du radicalement nouveau, nus. Alors, peut-être, nous, croyants, avons-nous tout d’abord à comprendre que nous avons à aller à la parole de Dieu comme nous sommes, dans la situation qui est la nôtre. De cette manière, il pourra nous être donné d’entendre de nouveaux aspects de la Parole de Dieu qui viendront éclairer autrement notre situation, ouvrir de nouvelles perspectives à notre liberté tout aussi bien personnelle que communautaire. Réentendre la promesse de manière neuve. Renaître encore une fois. Cela peut se jouer dans ce passage de l’évangile offert par la liturgie du jour.
 
Depuis quelques jours, quelques semaines, l’évangile de Marc donne à suivre un Jésus, actif, hyperactif même. Il est bondissant, en prise avec le présent, au ras des événements. Et là soudain, aujourd’hui, comme sans raison, il gravit la montagne. Il déploie une autorité souveraine : appelant, nommant, envoyant, instituant… il constitue ainsi un groupe qui sera capable de maintenir dans les aléas du quotidien cette ouverture vers le sens des choses, vers l’être plus que vers le faire. Ce groupe sera capable d’annoncer et de guérir, pas de tout régler mais de maintenir dans l’humanité l’ouverture vers notre promesse commune.
 
Notre situation présente peut entendre de manière nouvelle cette promesse et la litanie des noms des apôtres vient nous conforter encore. Les premiers disciples ont réussi à tenir cette attitude malgré leurs faiblesses, leurs trahisons même, alors nous aussi avec son aide nous le pourrons.
 
Ces quelques citations de Níkos Kazantzákis peuvent vous inspirer amis lecteurs :
 
Nous restâmes silencieux auprès du brasero, tard dans la nuit. Je sentais de nouveau combien le bonheur est chose simple et frugale : un verre de vin, une châtaigne, un misérable poêle, la rumeur de la mer. Rien d’autre. Et pour sentir que tout cela c’est du bonheur, il ne faut qu’un cœur simple et frugal.
 
L’âme humaine, embourbée dans la chair, est encore à l’état brut, imparfaite.
 
Tant que nous vivons un bonheur, nous le sentons difficilement. C’est seulement quand il est passé et que nous regardons en arrière que nous sentons soudain combien nous étions heureux.
 
Confucius dit : « Beaucoup cherchent le bonheur plus haut que l’homme ; d’autres, plus bas. Mais le bonheur est à la taille de l’homme. » C’est juste. Il existe donc autant de bonheurs qu’il y a de tailles d’hommes. Tel est, mon cher élève et maître, mon bonheur aujourd’hui : je le mesure, le remesure, inquiet, pour savoir quelle est maintenant ma taille. Parce que, tu le sais bien, la taille de l’homme n’est pas toujours la même.
 
C’est ça la liberté, pensai-je. Avoir une passion, entasser les pièces d’or et, brusquement, vaincre sa passion et jeter les pièces d’or aux quatre vents. Se libérer d’une passion pour obéir à une autre, plus noble. Mais cela n’est-il pas aussi une forme d’esclavage ? Se sacrifier pour une idée, pour sa race, pour Dieu ?
 
Lorsque tout marche de travers, quelle joie de mettre notre âme à l’épreuve pour voir si elle a de l’endurance et de la valeur ! On dirait qu’un ennemi invisible et tout puissant – les uns l’appellent Dieu, les autres diable – s’élance pour nous abattre ; mais nous restons debout. Chaque fois qu’intérieurement il est vainqueur, alors qu’au dehors il est vaincu à plate couture, l’homme véritable ressent une fierté et une joie indicibles. La calamité extérieure se transforme en un suprême et durable félicité.
 
Si on savait ce que disent les pierres, les fleurs, la pluie ! Peut-être bien qu’elles nous appellent, et que nous, on n’entend pas. Quand est-ce que les oreilles des gens s’ouvriront ? Quand est-ce qu’on aura les yeux ouverts pour voir ? Quand est-ce qu’on ouvrira les bras pour s’embrasser tous, les pierres, les fleurs, la pluie, les hommes ?
 
Níkos Kazantzákis ou Kazantzaki ou encore Kazantsakis (1883-1957), est un écrivain grec. Sage et bavard, oraculaire et chaleureux, coureur de jupons et faiseur de soupes, tel est Alexis Zorba, l’homme au baluchon. Son goût est sûr, son désir insatiable, son savoir instinctif : « une nature ». À l’heure où la civilisation radote, où l’idéologie gangrène l’intelligence, la voix d’Alexis Zorba est de celles qui crient dans le désert, mais monte haut, très haut, vers le ciel Nikos Kazantzakis dans Zorba le Grec Une pièce musicale la danse de Zorba Zorba the Greek (youtube.com)
 
Un autre texte inspirant
La conclusion de la 1ère conférence « Avoir part à la vitalité de Dieu » de Sarah Bachelard Microsoft Word - Sarah Bachelard 1ére conférence .docx (wccm.fr)
 
Nous traversons une période difficile - pour certains, la souffrance est aiguë dans notre monde, catastrophique. En même temps, nous sentons la possibilité d'un tournant dans notre vie commune -une occasion soudaine et inattendue de réaménager globalement les priorités, les systèmes, les solidarités. Le pape François a récemment décrit le moment présent comme le "moment propice » pour s’ouvrir à l'Esprit qui peut "nous inspirer une nouvelle imagination de ce qui est possible".
L'Esprit, dit-il, ne se laisse pas "enfermer ou manipuler par des méthodes figées ou dépassées ou des structures décadentes", mais nous pousse plutôt à "faire toutes choses nouvelles".
Il ne sert à rien d'être naïf à ce sujet - il y a peut-être encore beaucoup de souffrances à endurer ; beaucoup de vieilles dynamiques vont probablement se réaffirmer ; beaucoup de vieilles structures de pouvoir lutteront pour rester intactes. Malgré tout, il semble que le moment soit venu pour nous de redevenir présents à la source et à la forme de la vertu chrétienne, d'être ouverts aux idées que nous avons peut-être perdues de vue, et de renforcer ainsi notre capacité à prendre le parti du bien du monde. Car, comme l'a dit le grand maître juif, Hillel l'Ancien : "si ce n'est pas maintenant, alors quand ?"
 
Jean-Luc Fabre, compagnon jésuite
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :

Articles récents