Dans la paroisse de Saint Roch et Saint Maurice, il y a une bonne tradition qui consiste à demander à chaque groupe en lien avec la paroisse de prendre part à l’animation de la célébration eucharistique une fois par an. Aujourd’hui, c’est le groupe du Mouvement Chrétien des Retraités qui assume cette charge comme Denise nous l’a rappelé au début de notre célébration.
C’est une bonne chose, cela crée une relation vivante entre le groupe et l’ensemble des membres de la paroisse. J’ai déjà vécu cela avec le groupe de la méditation chrétienne auquel je participe, il y a quelques semaines. Le groupe s’ouvre à la vie plus large de la paroisse et la paroisse tire profit de l’expérience plus particulière de certains de ses membres.
Alors quelle est la bonne nouvelle qu’adresse le Seigneur en ce jour à notre communauté paroissiale en cette fin de l’octave de Pâques avec le prisme d’un groupe qui se réunit pour partager à partir de la parole de Dieu et à partir de ce que chacun vit…
Nous connaissons bien cette scène de l’évangile avec Thomas, bien souvent considéré comme un trouble-fête qui a du mal à croire, qui perturbe le fonctionnement du groupe… Mais avons-nous jamais pensé à ce qu’aurait été l’histoire si Thomas n’avait pas été absent ? Faisons un peu de l’évangile fiction.
Jésus serait venu au milieu d’eux. Il leur aurait dit : « La paix soit avec vous ! » Après cette parole, il leur aurait montré ses mains et son côté. Les disciples, tous les disciples, auraient été remplis de joie en voyant le Seigneur. Jésus leur aurait alors dit encore une fois : « La paix soit avec vous ! De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie. » Ayant ainsi parlé, il aurait soufflé sur eux et il leur aurait dit : « Recevez l’Esprit Saint. À qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis ; à qui vous maintiendrez ses péchés, ils seront maintenus. »… Et l’histoire aurait donc été presque la même si ce n’est que l’exception n’aurait pas eu de place. La manière de présenter la foi, de présenter la rémission des péchés n’aurait pas été la même par la suite… elle aurait été plus ferme, ne souffrant pas d’exception. Les premiers chrétiens étaient tous d’accord, alors nous aussi nous devons comme eux être tous d’accord. Le groupe a raison. Il sait ce qui est bon.
Thomas nous apporte ce bien précieux d’avoir le droit de ne pas céder à la pression du groupe, de ne faire qu’à partir de sa volonté libre. Et c’est Jésus lui-même qui lui reconnaît ce droit et même ce devoir… En effet, Jésus ne tient pas pour rien ce qu’a dit Thomas « Si je ne vois pas dans ses mains la marque des clous, si je ne mets pas mon doigt dans la marque des clous, si je ne mets pas la main dans son côté, non, je ne croirai pas ! » car Jésus lui répond une semaine plus tard en lui disant : « Avance ton doigt ici, et vois mes mains ; avance ta main, et mets-la dans mon côté : cesse d’être incrédule, sois croyant. »
Cela signe la manière dont la foi chrétienne est appelée à se proposer, elle n’a aucune valeur si elle est imposée. Elle doit naître de la liberté personnelle de l’homme. « Mon Seigneur et mon Dieu ! »
La séquence avec Thomas est un des signes précieux qui ont été écrits pour que nous puissions croire librement que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour qu’en croyant, nous ayons la vie en plénitude.
Et ce signe est bien je pense qu’il se rejoue dans chacun des groupes chrétiens, lorsque chacun écoute et parle librement, que la parole de chacun est attendue et entendue. Et c’est ce que nous cherchons à vivre modestement dans le groupe du MCR à Francheville.
Le temps pascal chaque année est là pour nous redire comment les premiers chrétiens sont devenus croyants, comment ils ont inventé, sous l’influence de l’Esprit, en s’appuyant sur le souvenir du Seigneur Jésus, l’Eglise.
Aujourd’hui, nous redécouvrons que l’Eglise n’est vraiment elle-même que lorsqu’elle permet à la parole de circuler en son sein. Demandons au Seigneur que tous les membres des groupes portés par notre paroisse en plus d’être à l’écoute de la Parole de Dieu, soient aussi à l’écoute les uns des autres, que chacun sache écouter, que chacun ose parler. Suscite aussi Seigneur au cœur de chaque croyant le désir de rencontrer son frère, sa sœur de parler avec lui, avec elle. Cela sera bon pour que nous puissions vivre plus pleinement de la bonne nouvelle, cela sera bon pour faire connaître la bonne nouvelle aux autres, cela sera bon aussi pour toute la société des hommes pour qu’elle respecte en son sein le plus petit et soit par-là plus humaine pour chacun de ses membres.
Jean-Luc Fabre, compagnon jésuite