C'est la dernière montée, la montée à Jérusalem. Notre Bartimée ressemble à cet exilé à qui Jésus redonne de vivre la montée à Jérusalem. Maintenant il peut chanter avec le palmiste : « je m'en allais en pleurant, je jetais la semence ; je m'en viens dans la joie, je rapporte les gerbes » ! Jésus, lui, vit cette montée à Jérusalem comme une graine qui va à sa Passion, une graine qui va tomber en terre. Il aura passé et invité les boiteux, les estropiés, les aveugles, pour les acheminer au « banquet » à venir. La foule augmentée par-ci par-là des malades exilés guéris restera alors suspendue. La marche va-t-elle s'arrêter au Golgotha ? Jésus avait mis la foule en mouvement. Elle le suivait, elle prenait goût à le connaître. Jésus de Nazareth, fils de David ! Le chemin allait-il stopper net ? ... La foule des exilés guéris repartira. Au moins par quelques-uns que le Ressuscité rencontrera, les « Bartimée » qui verront que suivre le Christ et le connaître de l'intérieur n'est pas fini. C'est la petite Église, le petit reste. Aujourd'hui c'est peut-être ce qui se joue, dans notre petite Église, celle qui reste, et qui bouge.
La gloire de Dieu c'est l'homme vivant, debout, en chemin avec le Christ, vers la Jérusalem céleste. Une Jérusalem qui ressemble peu à la ville du pays que l'on voit aujourd'hui... Jésus, te donnons-nous de rencontrer des « Bartimée » ? Te donnons-nous de t'arrêter, et d'appeler les exilés ? Les tiens ont rabroué ceux qui te cherchaient. Comme quoi on peut être chrétiens et barrer la route du royaume, il semble. Bartimée, merci d'avoir tenu. Sans toi nous ne chercherions plus à connaître de l'intérieur Celui qui nous met en chemin et nous ouvre la vue. Tu ne fais que passer, Seigneur, avec autorité, autorité - ce qui fait grandir -. Tu passes pour libérer notre Désir, enfoui ou empêché. Désir de voir, « Rabbouni que je voie ». Désir d'être debout, désir de suivre le vivant, désir de susciter la parole, l'écoute, et non les rabrouements. Nous avons en nous plein de désirs cachés. Dieu les réveille et nous pousse à crier. « Fils de David, Jésus, prends pitié de moi ». L'exilé espère un regard qui le considère, qui l'accueille tel qu'il est. La foule - des amis de Jésus ! - l'en empêche, pour protéger le maître sans doute. Mais Il retourne la foule, ouf !
Alors le mendiant, l'aveugle, pourra s'exclamer : « Quelles merveilles le Seigneur fit pour nous ! Nous étions en grande fête ! » Nous étions en mille morceaux, éclatés, loin des uns et des autres. Et nous voilà réunis, à suivre le Seigneur venu nous visiter, ensemble. C'est le miracle du Seigneur.
Olivier de Framond, compagnon jésuite