Célébrer la « chaire de saint Pierre » pourrait donner la chair de poule ! Pas sûr que nos amis protestants auraient mis les mêmes mots. Mais la Parole donnée à entendre est ferme et douce, qui invite seulement à devenir témoin du Christ. Elle nous fait contempler Pierre, après la Pâques (première lecture) puis avant (évangile). Entre les deux il a eu le temps d’être éprouvé, de refuser et d’accueillir la Passion du Christ, jusqu’à renier son Seigneur. Celui qu’il reconnaît comme « Christ et Fils du Dieu vivant » va le conduire à devenir « témoin de ses souffrances ». C’est le chemin à entreprendre pour « communier à « la gloire qui va se révéler ». Il avait espéré être témoin d’autre chose ; sa conversion de carême va être d’accueillir Dieu tel qu’Il est et se donne en Jésus. Alors il deviendra pasteur. « Sois le berger de mes brebis ».
Pour conduire à Celui qui sépare le bien du mal – les hommes les confondent en s’en faisant maîtres –, pour conduire le troupeau jusqu’aux pâturages de la terre et du ciel, nous avons, « les Anciens », à passer par cette conversion. Devenir témoin des souffrances du Christ fera communier à sa gloire, c’est sans doute ça, devenir « modèle du troupeau ». Devenir modèle, ou pasteur, c’est apprendre à discerner le bien et le mal pour choisir la Vie. J’ai à sortir de la confusion que je fais en m’arrogeant le droit de décider moi-même ce qui est bien ou mal. Car alors les brebis errent et tombent malades, muettes, empêchées de goûter la Vie. Tout au plus on aura « des gens » qui espèrent la venue du « Fils de l’Homme », une humanité retrouvée, Jésus « vrai Homme », nouveau Jean ou Elie ou prophète. Aux 12 et à Pierre, ce n’est pas « pour vous, qui est le Fils de l’Homme ? », c’est « pour vous, vous en esprit et en vérité, qui suis-je ? ». L’alliance n’est pas un vœu pieux à espérer, elle est création et salut en chemin qui s’opèrent, où se livrent l’Homme véritable et le vrai Dieu, en Jésus. Deux noms s’échangent alors, de Pierre à Jésus et du Christ à Pierre, qui fondent l’Église, la « chaire de Pierre ».
Olivier de Framond, compagnon jésuite
1 P 5, 1-4 ; Ps 22 (23), 1-2b, 2c-3, 4, 5, 6 ; Mt 16, 13-19