Jardinier de Dieu

Jardinier de Dieu

Pourquoi ce nom ? Un de nos jésuites va vous répondre


Se mettre à parler pour qu'un monde surgisse ...

Publié par père Jean-Luc sur 5 Décembre 2011, 00:01am

Catégories : #jeu de citations

Jean Baptiste un jour s’est mit à crier, à parler dans le désert. Cela ne s’est pas fait comme cela, un grand cheminement intérieur l’a lancé dans cette aventure personnelle, qui aura, nous le savons, un grand impact sur son peuple, qui donnera à Jésus de pouvoir lui aussi se lancer dans son œuvre d’annonce du Royaume. Jean Baptiste a fait sien le conseil exprimé par Euripide. Il a connu le silence, et en est sorti pour parler et que sa parole porte fruit...

images.jpgParle si tu as des mots plus forts que le silence, ou garde le silence. Euripide Extrait de Fragments

Et pourtant Jean Baptiste savait ce qu’il y avait dans le pauvre cœur de l’homme, l’état de fatigue spirituelle de son peuple, le renoncement à être, à exister qui minait le plus grand nombre. Il ne voyait plus rien avec espoir, et sa seule espérance était dans la venue d’un feu expiatoire. Il a tout de même espéré.

" L'espérance est la plus grande et la plus difficile victoire qu'un homme puisse remporter sur son âme. " Georges Bernanos (1888-1948) Ecrivain français : Extrait de La liberté, pourquoi faire ?

crier-t11679.jpgOù gisait sa force, la force de crier comme une simple voix dans le désert, alors qu’il vivait dans un extrême dénuement aussi bien alimentaire que vestimentaire ?... dans son espérance en Dieu, dans la Parole qui avait retenti dans les parages où il se trouvait, dans la geste des prophètes de l’ancien temps...

" L'espérance est le seul bien de ceux qui n'en ont plus. " Roger Bussy-Rabutin (1618-1693) Général et écrivain français : Extrait de lettre.

Ainsi il a crié mais il a aussi parlé, il a aussi tenu un discours, appelé son peuple. Sa perception s’est structurée, il a touché ses compatriotes, par sa vie mais aussi par ce qu’il disait, les images qui l’habitaient, celle du feu, de l’aire à vanner se sont transmises avec un message porteur de signification pour d’autres... Il a repris aussi les anciennes paroles de prophètes de l’ancien temps, toute cette littérature biblique... avec un souffle qui les ranimait.

« Parce que la littérature reste le seul moyen opérant pour maîtriser le langage. Et le langage, c'est ce qui est fondamental. Pas seulement pour vous permettre de vous exprimer d'une manière intelligente, nuancée, avec toutes les précisions que vous jugez nécessaires. Le langage, c'est ce qui permet à votre pensée de s'organiser. Le langage, c'est ce qui déploie et structure votre imagination, régit votre sensibilité, vos émotions, vos passions. » Mario Vargas Llosa : "Lire, c'est protester" Le Point.fr - Publié le 20/10/2011

Sa vision provenait à la fois de la geste des prophètes, des livres de la Loi et de la perception de la vie présente. L’écart entre l’idéal et la réalité vécue ainsi que l’écho du Livre de la Présence de Dieu ont donne force à son désir de changement, à son désir de ne pas accepter ce statu quo faux et débilitant. Il n’a plu été soumis à l’ordre des choses. Il tiendra aussi devant le roi en l’appelant à rectifier son mode d’existence. Cette insoumission au monde injuste lui sera une seconde nature...

« Seule la littérature, et notamment la fiction, peut vous donner la conscience que le monde, tel qu'il est, est mal fait, en tout cas qu'il n'est pas fait à la mesure de nos expectatives, de nos ambitions, de nos désirs, de nos rêves. Cette insoumission au monde tel qu'il est, seule la littérature vous la transmet, dès votre premier contact avec un livre, et ensuite d'une manière permanente, jusqu'à devenir une partie essentielle de votre personnalité ». Mario Vargas Llosa : "Lire, c'est protester" Le Point.fr - Publié le 20/10/2011

Son premier acte de résistance, non loin de Jérusalem a consisté à vivre au bord du Jourdain, cette modeste rivière dont le franchissement à signer l’entrée jadis dans le pays de la Promesse, la Terre donnée par Dieu, il séjournait dans le désert où son Peuple a vécu. Vivre comme au moment où soufflait la promesse pour que l’appel retentisse en lui comme une voix, puis devienne parole audible, appel à la conversion pour tous... Jean Baptiste s’est laissé inspiré.

« Je suis toujours intéressé par les endroits où il s'est passé quelque chose qui a fait basculer l'histoire. Ils sont pareils à des livres, silencieux, et j'en reçois comme une inspiration ». Les mondes de Jean-Marie-Gustave Le Clézio Le Point.fr - Publié le 01/11/2011

Il a pris son risque, il est sorti du silence, il est entré en débat, il a rencontré toute la population de Jérusalem, il s’est confronté aux différences de son peuple, il a conseillé les pauvres et les riches, les soldats et les fonctionnaires, les mères de famille et les hommes mûrs... Il a tenu à chacun la parole de l’espérance, il s’est dénudé de sa vie au désert, il s’est risque dans une relation sans retour avec son peuple, il s’est donné à lui.

« L'espérance est une vertu héroïque. On croit qu'il est facile d'espérer. Mais n'espèrent que ceux qui ont eu le courage de désespérer des illusions et des mensonges où ils trouvaient une sécurité qu'ils prennent faussement pour de l'espérance. L'espérance est un risque à courir, c'est même le risque des risques. L'espérance est la plus grande et la plus difficile victoire qu'un homme puisse remporter sur son âme ». Georges Bernanos

Il a espéré en chacun d’eux, au plus profond il savait qu’en chacun la promesse travaillait, qu’en chacun résidait un cœur d’enfant qui avait voulu vivre de la promesse, un cœur qui pouvait être réveillé, redonné à l’espérance.

« On ne saurait expliquer les êtres par leurs vices, mais au contraire par ce qu’ils ont gardé d’intact, de pur, par ce qui reste en eux de l’enfance, si profond qu’il faille chercher ». Georges Bernanos

Il s’est adressé à eux, comme un enfant pour réveiller en eux l’enfant. Il a été déraisonnable, et par cela il les a déroutés de leur chemin dénué de sens. Il a ramené ses frères à une attitude sage par une vie de folies et d’ascèses qu’il s’est imposé. Sachons, nous laisser toucher par la parole des autres lorsqu’elle part du plus vif, du plus natif, du plus sauvage, du plus déluré, du plus enfantin...

« Quand les sages ont épuisé leur sagesse, il faut écouter les enfants ». Georges Bernanos, Dialogues des carmélites

Et nous en ces premiers jours de l’Avent, nous pouvons honorer cet homme, le plus grand parmi les hommes, le plus petit dans le Royaume, cet homme qui a tout donné pour qu’un monde nouveau surgisse, pour que celui qui était plus grand que lui advienne... Notre hommage, en ces jours et en ces nuits, c’est de vivre un peu de ce silence qui l’habitait, ce silence du désert qui reconnait que l’Esprit souffle et cherche à se poser en chacun pour donner la figure du Royaume à notre monde...

« Le silence est un hommage que la parole rend à l'esprit ». Louis Lavelle Extrait de La Parole et l’écriture

Un monde nouveau est en gestation, un monde de beauté et de justice, un monde où tous pourront vivre pleinement dans le service, le respect et la louange... Faisons silence, découvrons le en train de germer...

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