Jardinier de Dieu

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Pourquoi ce nom ? Un de nos jésuites va vous répondre


3e dimanche de l'Avent, année C

Publié par Jean-Luc Fabre, compagnon jésuite sur 12 Décembre 2021, 15:55pm

Catégories : #Homélies

Tout au long de l’année, la liturgie de l’Eglise déploie, dans un cycle étendu, la contemplation du Christ en toute sa vie terrestre, en passant par sa conception, sa naissance, sa vie cachée, sa vie publique, sa passion, sa mort, ses apparitions comme Christ Ressuscité. Mais à travers ce premier parcours, la liturgie revisite, en même temps, notre être intégral d’homme, comme chercheur de sens, comme chercheur de Dieu, comme chrétien, comme pécheur, comme être pardonné, comme être appelé, comme être envoyé, comme frère, comme témoin. Car, selon notre foi, c’est bien l’être humain intégral qui est appelé à rencontrer et à tisser une vie intégrale et intime avec le Dieu, trois fois saint, qui révèle son mystère intégral dans la vie intégrale de Jésus, un homme parmi les autres hommes.

Durant l’Avent, c’est l’homme en toutes ses capacités humaines naturelles qui est mis en avant… Il nous est proposé d’aller au Christ et son mystère, avec toute notre humanité, d’une manière naturelle, à partir de nos seules forces humaines. Des figures sont là pour aider nos cheminements personnels, celles des membres du peuple de Dieu, comme Marie, Elisabeth, Zacharie, Joseph mais aussi celles des mages, eux qui viennent des Nations païennes adorer le Prince de la Paix… Parmi toutes ces figures, il y a la figure incontournable de Jean le Baptiste, celui dont il a été dit par Jésus lui-même « Parmi ceux qui sont nés d’une femme, personne n’est plus grand que Jean ; et cependant le plus petit dans le royaume de Dieu est plus grand que lui’ [Luc 7 28]. Ce plus grand et ce plus petit pour Jean trouvent dans le corpus lucanien un bel éclairage.

Cette année, nous sommes dans l’année saint Luc. Luc a produit un évangile, le troisième, mais aussi les Actes des Apôtres. Luc peut donc déployer d’une manière spécifique trois temps : celui d‘avant le Christ, celui d’avec le Christ et celui d’après le Christ… Cela permet à Luc à mettre des événements en relations, des figures également. Pour les événements, c’est Jésus qui est couché dans la mangeoire comme il le sera dans le tombeau, établissant un lien symbolique entre sa naissance et sa mort. Et, de même, il y a un parallèle à établir entre deux figures, celle de Jean Baptiste et celle de Pierre. Tous les deux sont confrontés à des membres du peuple qui viennent leur demander ce qu’ils doivent faire. Dans un cas, ce sera après la mort et la résurrection du Seigneur lors de l’irruption de l’Esprit de Pentecôte et la réponse de Pierre, à ceux qui ont déjà reçu l’Esprit et qui lui demandent « frère que devons-nous faire ? ». Il répondra seulement « recevez le baptême », les gestes de solidarité et de justice s’engendreront ensuite d’eux-mêmes comme nous le rappelle la fin du chapitre deux des Actes de cette vie fraternelle vécue « Tous les croyants vivaient ensemble, et ils avaient tout en commun ; ils vendaient leurs biens et leurs possessions, et ils en partageaient le produit entre tous en fonction des besoins de chacun. Chaque jour, d’un même cœur, ils fréquentaient assidûment le Temple, ils rompaient le pain dans les maisons, ils prenaient leurs repas avec allégresse et simplicité de cœur ; ils louaient Dieu et avaient la faveur du peuple tout entier. Chaque jour, le Seigneur leur adjoignait ceux qui allaient être sauvés » (vv. 45 47). Pour Jean, aujourd’hui, la situation est bien différente. A la même question, il répondra : « Moi, je vous baptise avec de l’eau ; […] Lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu ». Les actes de justice, à ce moment, en cette situation, ne sont pas le produit de l’Esprit agissant de lui-même dans le cœur des fidèles mais le signe imparfait mais réel d’une attente. Entre ces deux moments, celui de Jean et celui de Pierre, il y aura eu la manifestation de l’Esprit dans la vie du Christ et par sa mort et sa résurrection la possibilité pour cet Esprit d’habiter désormais en toute chair. « Et moi, je vais envoyer sur vous ce que mon Père a promis, sous-entendu l’Esprit » disait, aux premiers chrétiens, le Christ au moment de son élévation définitive.

En ce troisième dimanche de l’Avent, nous percevons, dans cette mise en perspective lucanienne, la promesse annoncée par Jean ainsi que sa pleine réalisation mise en acte par Pierre. Nous réalisons que nous sommes alors appelés à nous disposer à recevoir le germe de la promesse en nous pour lui laisser produire en nous son véritable fruit qui est à venir. Ce fruit véritable, nous le savons, passera par la mort et la résurrection du Seigneur, et par notre propre traversée de celles-ci d’une part dans la reconnaissance de notre incapacité à recevoir le don qui nous est fait et d’autre part dans notre ouverture au pardon gracieux. Mais, d’ores et déjà, nous sommes appelés à prendre très concrètement et très modestement ce chemin, à parcourir les premiers pas de notre conversion qui nous demande de faire tout ce que nous pouvons humainement faire et qui se présente à nous.

N’en doutons pas l’Esprit, vivant et manifesté en nous, apportera beaucoup mais avant qu’il ne se manifeste, il est déjà délicatement et secrètement agissant. Sachons préparer sa pleine venue, ouvrons nous à lui dans notre pauvreté humaine. Posons, nous aussi, les actes auxquels Jean Baptiste appelait ses contemporains, faisons actes de justice, aussi petits soient-ils. Laissons retentir en notre cœur la question « Que devons-nous faire ? » Puis posons les premiers linéaments de nos actions…

Nous percevrons alors la présence de Dieu en nous, la dynamique intérieure qui ne cesse de nous guider sur le chemin de vie. Comme nous l’a redit la prière d’ouverture « Tu le vois, Seigneur, ton peuple se prépare à célébrer la naissance de ton Fils ; dirige notre joie vers la joie d'un si grand mystère, pour que nous fêtions notre salut avec un cœur vraiment nouveau. ». Que cette joie de faire un premier acte de justice appelle chacun de nous à un davantage, comme jadis, la Vierge. En accueillant en toute justice le verbe de vie, Marie se voit conduite à aller vers sa cousine Elisabeth pour la secourir alors surgira en elle le chant du Magnificat. En prenant le chemin de la justice, en posant des actes modestes, comme des Jeans Baptistes, se tracera alors en nos cœurs, le chemin de l’Evangile, rendant nos cœurs, mis en mouvement, nouveaux, capables d’accueillir le salut. Continuons à nous tenir debout et à marcher… Sachons espérer ! Allons à lui ! Le salut vient naître en nous !

Jean Luc Fabre, compagnon jésuite

Merci à l'auteur de cette photo

 

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