Des maîtres, on en a à la pelle. Des « mon Père », ça diminue mais il y en a encore. Des Rabbis, il y en a. Et pourtant « vous n’avez qu’un seul Père, Celui du Ciel, vous n’avez qu’un seul maître, le Christ ». Nous l’entendons déjà à la première lecture, l’Alliance de Dieu avec son peuple élu semble une alliance impossible, sans arrêt défaite, instrumentalisée, et redonnée par les prophètes. Nous le retrouvons dans l’évangile : la Loi, ce don du ciel, est une nouvelle fois captée par leurs acteurs, détournée de leur Source. Chemin d’alliance hier, elle devient un instrument de pouvoir pour asseoir son honneur de prêtre, docteur, maître, rabbi et tout ce qui suit. Réflexe très humain en fait, mais qui peut faire peser sur les autres de lourds fardeaux que des pseudo-maîtres chargent sur leurs épaules.
Se faire entendre, les « mon père », rabbis et maîtres, que « vous n’avez qu’un seul Père, vous n’avez qu’un seul Maître », c’est redonner la parole aux prophètes. Elle retentira chez Paul comme un appel à seulement suivre Quelqu’un, le Christ, en écartant la soumission à une Loi trop reçue comme un programme ou des pratiques à respecter. Il faut le reconnaître, toute alliance peut paraître une mission impossible, en tout cas une vie dont je peux vouloir me défaire, car elle demande de recevoir la vie, jusqu’au bout. Elle fait entrer dans une sortie de soi qui ne trouve la paix et le pain qu’en « faisant la volonté du Père ». « Je ne fais rien de moi-même », dit le Fils de l’Homme. Alors notre seul travail est de tenir en éveil, car je ne suis jamais « le Père » ou « le Maître » de ma vie, je le reçois. Zut alors ? Pas de repos possible ? Si, mais en demeurant en Lui, le Père, en Lui, le Christ. Seul chemin de paix véritable … Père, que ton Œuvre advienne, Jésus, que nous demeurions en Toi.
Olivier de Framond, compagnon jésuite