En ce temps-là, une fois sortis de la synagogue, les pharisiens se réunirent en conseil contre Jésus pour voir comment le faire périr. Jésus, l’ayant appris, se retira de là ; beaucoup de gens le suivirent, et il les guérit tous. Mais il leur défendit vivement de parler de lui.
Ainsi devait s’accomplir la parole prononcée par le prophète Isaïe :
Voici mon serviteur que j’ai choisi, mon bien-aimé en qui je trouve mon bonheur. Je ferai reposer sur lui mon Esprit, aux nations il fera connaître le jugement. Il ne cherchera pas querelle, il ne criera pas, on n’entendra pas sa voix sur les places publiques. Il n’écrasera pas le roseau froissé, il n’éteindra pas la mèche qui faiblit, jusqu’à ce qu’il ait fait triompher le jugement. Les nations mettront en son nom leur espérance.
« Une fois sortis de la synagogue, les pharisiens se réunirent en conseil » Les pharisiens et Jésus viennent de vivre un affrontement. Les uns se réunissent aussitôt pour tramer un complot et anéantir leur opposant. Ils sont sous l’emprise de la situation qui les commande. L’autre, Jésus, quant à lui, va son chemin propre à la sortie de la synagogue. Il est suivi librement par des gens, il fait du bien, il les guérit : « beaucoup de gens le suivirent, et il les guérit tous ». Mais Jésus ne cherche en aucune manière à ce que ces guérisons lui soient un rebond. Pourquoi ces différences entre eux ? Parce que certains ne sont qu’à l’écoute d’eux-mêmes, de leur image et ne perçoivent la réalité qu’à partir d’eux, de leur action. Jésus, lui, vit, agit dans la relation étroite avec un autre qui aime, qui est bienveillant, dont la relation excède la situation : son Père. Il va selon le rythme de la relation avec lui, de l’œuvre avec Lui, son action est pur témoignage du Père. Et par cela, mystérieusement, il tisse un possible radicalement nouveau pour toute l’humanité par sa simple action…
« Ainsi devait s’accomplir la parole prononcée » Son action, ainsi menée dans sa vie publique puis dans sa Passion, dans le pas à pas des situations, dans la main à la main avec le Père, son action va porter le fruit escompté, tel qu’annoncé, prophétisé, jadis, par Isaïe. Réalisons bien que l’action que mène Jésus est différente de toutes les autres actions humaines. C’est une action purement en lien avec son Père. Il est celui que Dieu aime et qui aime Dieu pleinement en retour. Sur lui, repose l’Esprit du Père qui pourra toucher les autres hommes, parce que lui, un homme, Jésus, lui a dit et lui dit complétement « oui » à lui, le Père. Sa temporalité n’est pas notre temporalité qui demeure engluée dans la situation et la quête du succès. Elle est celle de la relation intime avec le Père. Cette relation renouvelle radicalement l’aventure humaine. A cette relation avec le Père, à son terme, il invitera chacun et le fruit murira… c’est bien par-là, en effet, que se termine le passage d’Isaïe.
« Les nations mettront en son nom leur espérance ». Toute situation, à laquelle nous sommes et seront confrontés, est désormais marquée par son chemin d’humanité à lui, Jésus, le serviteur, le Bien Aimé, signée de son Nom. Jésus a fait triompher le jugement de la miséricorde. En chacune de nos situations, il nous donne de pouvoir la vivre, unis comme Lui au Père. Il nous rend capables de dépasser notre enfermement dans une manière étroite de voir, tournée sur nous-même, faisant abstraction de l’amour plus large, pour tous les êtres et pour notre Créateur. Avec Lui, maintenant, nous pouvons marcher, nous offrir car Il ne cesse de nous donner d’espérer une issue pour nous et pour tous… Il donne ainsi à l’humanité entière de pouvoir se rassembler, comme le dit la fin du Psaume 1 : en parlant du « rassemblement des justes ». Oui, car le Seigneur « connaît le chemin des justes », celui ouvert par son Fils Bien Aimé. Bonne marche à chacun en sa situation propre. Il est avec nous tous, toujours !
Jean-Luc Fabre compagnon jésuite