L’annonce de la venue du messie tirait l’histoire vers son futur. L’événement prenait corps dans un peuple identifié, un temps donné et une époque précise de l’histoire. Que Dieu se prépare à opérer son propre passage n’avait pas été perçu dans toute sa valence matérielle jusqu’à ce qu’il advienne ! Pourtant, il serait incongru de penser l’éclosion de l’histoire sans qu’elle fût éminemment concrète et universelle.
Alors, Pâques suscita la perplexité et la stupéfaction. D’aucuns prirent leur distance avec l’événement, tandis que d’autres s’ouvrirent à cette éclosion divine. Depuis, Pâques est devenu la source de l’histoire, où Dieu agit souvent de manière anonyme et inaperçue. Néanmoins, la communauté qui s’est ouverte à ce passage est là pour reconnaître ses traces, les signifier et rendre grâce.
Pâques ouvre surtout le temps de la fraternité dans le monde, puisque Dieu a opéré son passage pour tous les peuples. La fraternité doit être manifeste en premier lieu au sein de la communauté qui s’est formée en cette occasion. Des témoins, en leur temps, l’ont signifié envers les premiers membres en confessant : « Voyez comme ils s’aiment. » La fraternité doit se manifester à l’extérieur par l’engagement dans les blessures du monde à l’image de l’extrême implication divine dans l’histoire. Elle doit aussi s’opérer dans le nouvel espace de jeu du monde caractérisé par les technosciences, l’intelligence artificielle, l’aventure spatiale, de sorte que des contemporains murmurent : « Voyez comment ils font. »
Roland Cazalis, compagnon jésuite
Replanter n°12, Pâques 2023