« Il ne perdra pas sa récompense ». A vrai dire cet évangile de Matthieu m’a souvent indisposé. Qu’est-ce que c’est, ces gens qui ne cherchent que des récompenses ?! Et puis c’est quoi, une « récompense de prophète » ? C’est quoi, une « récompense d’homme juste » ? Et on nous parle de récompense alors que je croyais que le don de Dieu était gratuit et que les mérites n’avaient pas leur place dans l’Evangile…
Une lueur est venue. Le dernier type de personne évoquée est le disciple. Il lui vient le geste de servir un verre d’eau, et il est précisé : « en qualité de disciple ». C’est donc que ce geste lui est inspiré de son amour pour le Christ, comme la veuve de Sarepta avait autrefois soulagé la soif d’Elie. Et c’est là encore que l’on entend que « il ne perdra pas sa récompense ». Et si, plutôt qu’une simple récompense, il s’agissait d’un fruit, un don, reçu en se donnant. Et ce don est un reflet de Celui qui le pousse à ce geste. Il ne la cherche pas, cette récompense. Simplement une joie de servir lui est donné, qui l’unit à Celui qui la lui a inspirée : le Christ. Il donne de ce qu’il a reçu du Christ : une présence, un accueil, une recréation. Ce qu’il a fait à un tout-petit, c’est au Christ qu’il l’a fait. C’est cela qu’il goûte, sans le chercher. Un prophète, en se donnant, reçoit de goûter le cœur de Celui qui l’a envoyé porter la nouvelle. Un juste, en se donnant, reçoit d’être uni au Juste qui l’a envoyé aux pauvres.
Alors nous n’avons qu’une chose à faire : nous laisser surprendre par Celui que nous accueillons et qui nous envoie. Est-ce que je me laisse envoyer par mon bien-aimé, ma bien-aimée ? Si je l’accueille, et si j’accueille Jésus, le prochain, moi-même aussi, comme le Père accueille son bien-aimé, alors oui, je connaîtrai le don de Dieu. Et alors oui, je serai digne de toi, Seigneur Jésus. Car c’est toi que j’accueillerai d’abord, en lui, en elle, mon conjoint, mon prochain, et même moi-même !
Olivier de Framond, compagnon jéuite
