26 décembre ; Evangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu 10,17-22.
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Méfiez-vous des hommes : ils vous livreront aux tribunaux et vous flagelleront dans leurs synagogues.
Vous serez conduits devant des gouverneurs et des rois à cause de moi : il y aura là un témoignage pour eux et pour les païens.
Quand on vous livrera, ne vous inquiétez pas de savoir ce que vous direz ni comment vous le direz : ce que vous aurez à dire vous sera donné à cette heure-là.
Car ce n’est pas vous qui parlerez, c’est l’Esprit de votre Père qui parlera en vous.
Le frère livrera son frère à la mort, et le père, son enfant ; les enfants se dresseront contre leurs parents et les feront mettre à mort.
Vous serez détestés de tous à cause de mon nom ; mais celui qui aura persévéré jusqu’à la fin, celui-là sera sauvé. »

« C'est l'Esprit de votre Père qui parlera en vous »... Pourquoi donc Jésus ne dit-il pas plutôt : « c’est mon Esprit qui parlera en vous » ?... Répondre à cette question peut nous permettre de mieux connaître Jésus en profondeur.
En premier lieu, nous pouvons répondre : parce que Jésus fait lui-même l’expérience de ce qu’il annonce et propose à ses disciples. En lui, Jésus, c’est bien l’Esprit du Père qui parle. Jésus le vit au quotidien, dans sa mission, mais il annonce aussi qu’il le vivra également par la suite dans un contexte de radicale division et de haine extrême comme celui qu’il décrit pour ses disciples, au moment de sa Passion. Nous sommes en effet dans cette scène à un moment relativement calme du récit, au milieu de l’Evangile, mais Jésus sait vers où le conduit sa fidélité à Dieu son Père. Il sait aussi ce qu’il y a dans le cœur de l’homme. Il sait que son action véritable sera de témoigner de son Père jusqu’au bout... sous l’injonction de l’appel par l’Esprit. Jésus marche vers sa Passion.
A ce moment de son ministère, Jésus propose donc à ses disciples de prendre le même chemin que Lui. A vrai dire, il n’y en a pas d’autre dans la fidélité au Dieu de l’Alliance. Cela fonctionne presque comme une loi physique avec sa détermination. Ce qui arrive à Jésus, c’est ce qui arrivera aux disciples, c’est aussi ce qui arrivait aux prophètes... Cette manière de vivre, au milieu des hommes et sous la mouvance de l’Esprit, est celle de Jésus mais elle peut être vécue par d’autres aussi de manière très comparable, sous l’action du même Esprit, celui du Père, dans le même contexte conflictuel. C’est donc bien l’Esprit du Père qui parle en Lui, Jésus, et en nous.
Mais Jésus le vivra d’une manière si parfaite au moment de sa Passion, que cet Esprit du Père se révélera aussi être son Esprit que d’autres peuvent recevoir comme Lui, Jésus, le reçoit, et Le recevoir de Lui, Jésus... Ils peuvent le recevoir « en Son Nom », en fonction de ce que Lui, Jésus, aura vécu. Après la Mort du Christ ils peuvent devenir chrétiens. C’est ce qui arrive à Etienne, le premier martyr. L’Esprit du Christ en Lui est l’Esprit du Père. Etienne a les mêmes sentiments, attitudes que le Christ envers le Père et envers ses persécuteurs... c’est donc aussi l’Esprit du Fils en lui qui parle, qui lui donne sa forme de témoin, de martyr...
Ainsi, en ce passage de Saint Matthieu, Jésus dit : « C'est l'Esprit de votre Père qui parlera en vous »... parce qu’il n’a pas encore été amené à sa perfection comme le dit l’épitre aux Hébreux « Le Christ, pendant les jours de sa vie mortelle, a présenté avec un grand cri et dans les larmes sa prière et sa supplication, à Dieu qui pouvait le sauver de la mort; et, parce qu’il s’est soumis en tout, il a été exaucé. Bien qu’il soit le Fils, il a pourtant appris l’obéissance par les souffrances de sa passion; et, ainsi conduit à sa perfection, il est devenu pour tous ceux qui lui obéissent, la cause du salut éternel ». Ensuite, à ses apparitions comme Ressuscité, Jésus dira « Recevez mon Esprit ».
Nous voyons par petites touches que s’exprime en cette scène toute la dynamique du Mystère de la Trinité à laquelle nous pouvons accéder d’une certaine manière. Ce champ est bien vaste qui va du disciple appelé à témoigner en situation à la révélation du Mystère au sein du Dieu de Vie, mystère qui se révèle pleinement à la Passion mais révélation qui s’ébauche dès la naissance de Jésus et ouvre à cette vie de Jésus que nous sommes appelés à aimer infiniment car elle est le lieu pour nous de la rencontre et de l’enseignement de la vie chrétienne.
Jean-Luc Fabre, compagnon jésuite