La doctrine du purgatoire est fondée sur ceci que, pour être unis à Dieu dans une communauté de vie, il faut que nous soyons tout amour comme lui-même est tout amour. Pas un atome, pas un grain d'égoïsme ne peut entrer en Dieu. Seul l'amour est assimilable à l'amour. Qui donc oserait penser qu'à l'heure de sa mort, il est constitué en état de parfait amour et qu'il n' y a plus en lui le moindre atome d'égoïsme ? La Vierge Marie étant seule exceptée, c'est impossible.
Disons, en jouant sur les mots : pour que l'amour soit concommé, il faut que l'égoïsme soit consumé. Pour que l'amour soit consommé en béatitude, il faut que l'égoïsme soit consumé en repentir purifiant.
Une telle purification, qui atteint le fond de l'être ne peut pas être douloureuse.
L'arrachement à soi, c'est la souffrance même. La souffrance du temps présent
commence déjà cette oeuvre de purification. Et si la souffrance n'avait pas cette valeur de purification, elle serait purement et simplement un non-sens, un scandale.
Il y a donc un purgatoire dès ici-bas.
Il n'y a rien de surprenant à ce que la Tradition compare à un feu cette brûlure de la purification. Purgatoire signifie aussi purificatoire. Au fond, c'est le même feu qui damne en enfer, qui
purifie en purgatoire, qui bétifie au ciel. Dieu ne change pas, le feu de l'amour est toujours le même. C'est nous qui sommes différent devant l'amour immuable et infini : si nous sommes
totalement contraires à l'amour, le feu de Dieu nous torture ; si nous sommes capables de purification, ce feu nous purifie ; et si nous sommes unis à Dieu, ce feu nous
béatifie.
François VARILLON, Joie de croire, joie de vivre,
conférences recueillies par Bernard Housset,
Le Centurion, 1981, p.203.