Dans mon ministère à Buenos Aires, j’ai touché du doigt cette réalité avec ses problèmes : « Les personnes âgées sont abandonnées, et pas seulement à la précarité matérielle. Elles sont abandonnées par notre incapacité égoïste d’accepter leurs limites qui reflètent nos limites, dans les nombreuses difficultés qu’elles doivent aujourd’hui surmonter pour survivre dans une civilisation qui ne leur permet pas de participer, de donner leur avis, ni d’être des référents, selon le modèle consumériste du « seuls les jeunes peuvent être utiles et peuvent être heureux ». Ces personnes âgées devraient être au contraire, pour toute la société, la réserve de sagesse de notre peuple. Les personnes âgées sont la réserve de sagesse de notre peuple ! Avec quelle facilité la conscience s’endort-elle quand il n’y a pas d’amour ! » (Seul l'amour nous sauvera / Solo l’amore può salvare, Città del Vaticano, 2013, p. 83). Et c’est ce qui se produit. Je me souviens, quand je visitais les maisons de retraite, je parlais avec chacun et j’ai souvent entendu ceci : « - Comment allez-vous ? Et vos enfants ? – Bien, bien. – Combien en avez-vous ? – Beaucoup. – Et ils viennent vous rendre visite ? – Oui, oui, toujours, oui, ils viennent. – Quand sont-ils venus la dernière fois ? » Je me souviens d’une vieille dame qui m’a répondu : « Mais… à Noël ». Nous étions au mois d’août ! Huit mois sans visite de ses enfants, huit mois abandonnée ! Cela s’appelle un péché mortel !
Le Pape François se laisse toujours instruire par ce qu’il a vécu, dans la foi que le Seigneur lui parle aussi dans le quotidien de ses jours. Par-là, il mesure vraiment en quoi consiste le problème actuel des personnes âgées. Et oui, comme en toute chose, comment penser pouvoir apporter remède si nous ne faisons pas d’abord le bon diagnostic et pour cela la première des choses, c’est d’aller vers, de rencontrer… de sortir de soi…
Jean-Luc Fabre, compagnon jésuite