Vers la communion entre frères ...

« Il est inévitable qu'il arrive des scandales ». La situation, elle est telle qu’elle est et non telle que nous la rêverions, toujours... Sans cesse, et en tout [santé, travail, affection...], nous sommes appelés à consentir au réel, à quitter notre représentation, à perdre ce que nous avons pour avancer et dire un « oui à la vie» renouvelé et plus pauvre. Aussi un hiatus, parfois cruel mais inévitable, peut surgit entre notre aspiration au bien, à ce qui compte pour nous, et la réalité. La souffrance provient de ce point où nous sommes atteints dans notre capacité à croire, à espérer, à s’ouvrir, à vivre. Nous nous sentons près de défaillir en notre être, niés, bafoués en notre capacité d’action... Beaucoup de cela arrive dans bien des cas en dehors de toute implication directe de liberté humaine mais parfois la liberté humaine d’un frère y est directement impliquée. Et cette contradiction fait encore plus scandale. Elle peut nous enrager. Cela appelle un changement, une conversion de notre fait, du fait de l’autre. Pour nous, il s’agit d’abord d’accueillir la réalité plus entière [au-delà du scandale même] pour voir comment notre aspiration première y retrouve légitimité et pour trouver ainsi le chemin pour avancer de nouveau sur la « terre des vivants ». Pour l’autre, le Seigneur nous encourage à développer l’attitude suivante...

« Tenez-vous sur vos gardes ». L’attention est bien l’origine de la vie spécifiquement humaine qui prend soin, prend le temps d’être. Cela requiert, en toutes nos dimensions, l’orientation de notre volonté. Là le Seigneur nous appelle à l’attention envers notre propre cœur, pour contribuer à rendre possible la reconstruction de l’unité entre mon frère et moi : le premier pas consiste à parler, à dire les choses mais il nous invite dans la foulée à un second, impliqué par le premier : l’offre du pardon à l’autre. Il nous donne d’entrer dans une vision, une attitude qui dépasse nos propres capacités, qui nous appelle à nous situer autrement dans la réalité. A vrai dire, il nous invite à prendre le point de vue de Dieu le Père, que lui Jésus va manifester dans sa Passion... Aussi nous ne pouvons faire autrement que de nous mettre à la suite des premiers disciples, les Apôtres...

« Augmente en nous la foi ! » Là Jésus nous projette encore plus loin, vers ce qui est au cœur de sa propre réponse, c’est Lui qui plante l’arbre de la Croix dans la mer du péché, du renoncement, de la trahison pour que la vie s’impose par sa splendeur et donne à tous de la reconnaître et de vivre à partir de son don reçu. Que tout soit Eucharistie, que notre action ne soit plus qu’action de grâce, que Dieu soit tout en tous... Chaque épreuve est en son fond appel à rejoindre ce lieu où surgit en nous l’homme véritable, l’homme selon Dieu, le frère de Notre Seigneur Jésus Christ... avec toute l’humanité appelée à se rassembler. Remettons-nous en chemin !

Père Jean-Luc Fabre

Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc 17,1-6.

En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Il est inévitable que surviennent des scandales, des occasions de chute ; mais malheureux celui par qui cela arrive !
Il vaut mieux qu’on lui attache au cou une meule en pierre et qu’on le précipite à la mer, plutôt qu’il ne soit une occasion de chute pour un seul des petits que voilà.
Prenez garde à vous-mêmes ! Si ton frère a commis un péché, fais-lui de vifs reproches, et, s’il se repent, pardonne-lui.
Même si sept fois par jour il commet un péché contre toi, et que sept fois de suite il revienne à toi en disant : “Je me repens”, tu lui pardonneras. »
Les Apôtres dirent au Seigneur : « Augmente en nous la foi ! »
Le Seigneur répondit : « Si vous aviez de la foi, gros comme une graine de moutarde, vous auriez dit à l’arbre que voici : “Déracine-toi et va te planter dans la mer”, et il vous aurait obéi. »